Les phares, sur leur colonne de granit ou de fonte, ont bien une âme, et c’est celle des gardiens qui veillent sur eux, qui les entretiennent et assurent la régularité de leurs mouvemens. Cette surveillance et cet entretien ne s’exercent pas de la même façon dans tous les phares. Il est constant que les entrées des ports et les embouchures des fleuves ouverts à la navigation maritime ont été regardées pendant longtemps comme les seules parties des côtes qu’il fût nécessaire d’éclairer : d’où le petit nombre des phares, qui étaient presque tous placés à terre. L’éclairage, par surcroît, en était rudimentaire ; les lampes mal entretenues ; le personnel recruté vaille que vaille (on enrôlait généralement de vieux retraités de la marine, des invalides, quelquefois des femmes). Livrés à eux-mêmes, sans aucun contrôle que celui des inspecteurs de passage, les gardiens n’apportaient point à leur tâche toute la régularité désirable. En 1816 particulièrement, il y eut plusieurs plaintes déposées par des capitaines du commerce « contre la négligence des gardiens allumeurs des feux du cap Fréhel. » En 1829, le capitaine Lastelle, débarquant à Saint-Malo, se plaignit d’avoir trouvé, dans la nuit du 23 au 24 octobre, le mouvement des phares suspendu[1]. Les faits de cette sorte étaient assez fréquens. L’organisation actuelle n’en permettrait pas le retour. Sévèrement recruté, le personnel des phares est soumis à une surveillance de tous les instans : si quelques fanaux de médiocre importance ont encore des femmes pour gardiennes, le personnel est exclusivement masculin dans les phares proprement dits. Les gardiens doivent être valides ; ils subissent à cet effet un examen médical qui porte sur la vue et l’état général de la constitution ; la limite d’âge pour l’entrée en fonction, fixée d’abord à quarante ans, a été abaissée à trente-cinq ; une certaine instruction est requise ; le postulant n’est nommé enfin qu’après un stage qui permet d’apprécier son intelligence et sa moralité.
Ce stage n’est pas moins nécessaire, surtout dans les phares électriques, d’un outillage si compliqué, pour le mettre au courant du service : à Planier, à la Hève, au phare d’Eckmühl, etc.,
- ↑ Cf. Habasque : Les Côtes-du-Nord.