lui. Et quand autour du souverain se presse leur rempart vivant et fidèle, quand les représentans de l’armée semblent faire un avec le représentant de la patrie, quand cette profusion mouvante de costumes et d’insignes s’ébranle et suit la petite couronne d’or qui étincelle comme une étoile au sommet d’un heaume, quand les marins se divisent en deux troupes pour encadrer cette troupe de chefs, quand riche de sa diversité et éblouissante des éclairs que lancent les ors, les argens et les armes, elle s’éloigne entre les deux masses uniformes, simples et alignées, qui la précèdent et la suivent, c’est une vision de l’Allemagne guerrière qui passe.
Au champ du Cénacle. Mardi 1er novembre.
Lorsque les Sultans veulent témoigner une gratitude particulière à un prince chrétien, ils lui offrent à Jérusalem un des lieux consacrés par les souvenirs du Sauveur. Ainsi l’Islam lui-même rend un involontaire honneur à la religion qu’il méprise, et la terre vraiment sainte retourne peu à peu, même sous la souveraineté ottomane, aux mains chrétiennes. Mais comme beaucoup de ces dons ont été faits, et comme la foi musulmane s’interdit d’aliéner ceux des anciens sanctuaires qu’elle a transformés en mosquées ou affectés à une destination pieuse, le nombre est devenu rare des terrains libres et dignes d’être offerts.
L’alliance de Guillaume II est trop précieuse à Abdul-Hamid pour que le Sultan n’entretienne pas cette amitié par toutes les sortes de présens, et l’ambition d’un protectorat religieux rendait souhaitable à l’Empereur l’octroi d’une place importante dans Jérusalem. Aussi, dès les premiers bruits de voyage, une presse assez habile pour savoir qu’on rend parfois vraies les nouvelles à force de les répandre et que plus on demande plus on obtient, avait-elle annoncé la cession du Cénacle à l’Empereur. Le lieu où le Christ célébra la Pâque est, depuis trois siècles et demi, une mosquée, et le prophète David y a son tombeau : deux raisons, décisives comme sont à la conscience musulmane les raisons religieuses, pour qu’un tel présent ne fût pas fait. Il fallait du moins trouver une compensation ou son apparence. Touchant les murs de la mosquée est un champ qui mesure le tiers à peu près d’un hectare. La maison de la Vierge aurait été là, et l’Église du Cénacle, bâtie par les Croisés, se serait étendue jadis sur une partie de ce terrain. Ces traditions l’avaient depuis longtemps désigné à la