mesures préventives en vue de placer les adversaires des pactes allemands en présence du fait accompli.
C’est là qu’il faut chercher les motifs de la précipitation avec laquelle le gouvernement italien, prévenant de pressantes sollicitations ou cédant à des pressions irrésistibles, se décidait, en juin 1891, onze mois avant l’échéance, à consentir au renouvellement de la Triple Alliance, non plus seulement pour cinq ans, mais pour une nouvelle et longue période de douze années.
La situation était totalement modifiée par l’événement ; il fallait renoncer à détacher l’Italie du système allemand ; tout le bénéfice des efforts poursuivis depuis un an se trouvait compromis par là même.
Convenait-il d’accentuer la pénible impression que nous devions ressentir, en reprenant vis-à-vis de nos voisins l’attitude qui avait déjà contribué à tendre les relations ? C’eût été le moyen de décourager les partisans de l’entente, d’aliéner les sympathies qui nous restaient dans la Péninsule et de renforcer la ligue contractée avec les puissances centrales, en la faisant envisager comme une sauvegarde contre nos ressentimens. Aucun profit à attendre d’un pareil système, qui n’aurait pas été d’ailleurs exempt d’inconvéniens ni même de périls.
Il y avait mieux à faire : c’était de nous rallier l’Italie par ses propres intérêts, et de lui créer une situation telle qu’en cas de conflit européen, le souci même de sa fortune intervînt pour la détourner d’une rupture avec la France.
Un tel plan était-il pratique et compatible avec les intérêts que nous avions à ménager nous-mêmes ? Il était facile de s’en convaincre par un mûr examen du problème.
La dénonciation de notre traité de commerce et l’établissement de nos nouveaux tarifs douaniers avaient privé l’Italie de ses meilleurs marchés pour l’écoulement de ses produits agricoles, qui constituent son principal revenu. Vainement avait-elle espéré, par la conclusion de nouvelles conventions avec l’Allemagne, l’Autriche-Hongrie et la Suisse, s’ouvrir en Europe des débouchés susceptibles de compenser les effets de sa lutte économique avec la France. Une expérience de peu d’années ne devait pas tarder à la convaincre de son erreur, en démontrant que