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des administrateurs, sous prétexte d’une infraction à la loi sur les syndicats.

L’émotion causée dans le public par ces affiches fut très grande ; beaucoup de gens se laissaient intimider par le ton d’assurance du Syndicat ; mais, grâce aux mesures prises, aucun incident sérieux ne se produisit, et le service ne fut pas arrêté un seul instant, ni à Paris, ni en province.

L’entrée en ligne du Syndicat Guérard ranima un peu l’entrain des grévistes. Le 13, les peintres réunis à la Bourse du Travail votent encore la continuation de la grève. Les menuisiers font de même, ainsi que les plombiers, couvreurs, zingueurs, malgré les protestations de la Chambre patronale de couverture, plomberie, assainissement et hygiène. Mais c’est un dernier effort, et la grève s’arrête, paralysée, non pas par l’attitude du gouvernement ou par l’épuisement des grévistes, mais par l’intervention des vrais syndicats ouvriers, qui n’entendent pas servir plus longtemps de prétexte à des tentatives qu’ils réprouvent. L’esprit corporatif se réveille, et les premiers à réagir sont ceux mêmes qui ont commencé la grève. Le 13, les terrassiers se réunissent une dernière fois à la Bourse du Travail ; leurs sentimens sont si connus qu’un seul membre du Comité, le citoyen Grangier, assiste à la réunion. Un seul orateur parle en faveur de la continuation de la grève. Les 2 000 assistans protestent et votent la reprise des travaux municipaux et départementaux, en y mettant une seule condition, destinée à sauver les apparences, c’est que le gouvernement fasse retirer les troupes. Les débardeurs, qui ont obtenu des entrepreneurs 6 francs par jour avec un engagement de trois ans, décident également la reprise du travail.

La grève est finie ; les ouvriers, très satisfaits du résultat obtenu, n’entendent pas le compromettre en s’engageant dans une aventure comme celle de la grève générale, et ils prouvent aux agitateurs de la Bourse du Travail qu’ils veulent bien se servir d’eux, mais non pas les servir.

Aussi, le 14 octobre, la Fédération des mécaniciens-chauffeurs de France et d’Algérie, un des syndicats professionnels les plus puissans et les mieux organisés, répond-il à l’invitation du Syndicat Guérard par la circulaire suivante :

Camarades,

Des ambitions étrangères à la corporation des agens de chemins de fer ont déclaré la grève, à la suite de délibérations mystérieuses et sans contrôle.