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M. le général Pelloux ensuite, sans rien modifier à la situation internationale de leur pays, ont imprimé à sa politique à notre égard une allure incomparablement plus modérée. Cette transformation a pris un caractère encore plus accentué à partir du moment où M. Visconti-Venosta est arrivé au ministère des Affaires étrangères. M. Visconti-Venosta appartient par son âge à la période où le patriotisme italien a traversé la crise héroïque d’où il est sorti victorieux : ses souvenirs le reportaient par conséquent à une France amie, dévouée, utile. Il s’est appliqué à supprimer, ou du moins à diminuer les obstacles artificiellement dressés entre nous. La Tunisie, par exemple, avait été un champ de bataille politique où les deux gouvernemens, après s’être disputé longtemps la prééminence, continuaient encore une lutte qui, depuis plusieurs années déjà, était sans objet. Le cabinet de Rome l’a compris. Les arrangemens par lesquels il a définitivement reconnu les conséquences de notre protectorat sont du mois de septembre 1896. Quelques jours après, un nouvel arrangement rétablissait entre l’Italie et la France des rapports normaux en matière de navigation, car on s’était fait la guerre économique sur mer comme sur terre. On y a mis fin. Dès lors, il n’y avait plus, de part ni d’autre, aucune raison, voire aucun prétexte, de ne pas rétablir de meilleurs rapports douaniers, en d’autres termes de ne pas passer du tarif général au tarif minimum. Ce n’est pas parce que l’Italie fait partie de la Triple Alliance que nous pouvions lui appliquer un régime plus rigoureux qu’à l’Autriche et à l’Allemagne, qui en font partie également. Le moment était venu de nous accorder mutuellement nos tarifs conventionnels. En d’autres termes, nous devions traiter l’Italie comme tout le monde, et elle devait nous traiter de même.

Dans la préparation de cet arrangement, l’esprit protectionniste n’a d’ailleurs perdu aucun de ses droits. Dire, en effet, que nous accorderons désormais à l’Italie notre tarif minimum n’est pas absolument exact : c’est l’Italie qui accorde le sien à nos produits, mais nous ne lui appliquons pas tout à fait le nôtre, puisque nous y faisons deux exceptions importantes. L’une se rapporte aux soies et aux soieries. On a jugé qu’elles étaient médiocrement, ou même insuffisamment protégées par nos tarifs conventionnels, et qu’il y aurait quelque danger pour l’industrie lyonnaise à faire bénéficier purement et simplement l’Italie de ce tarif. Les soies et soieries ont donc été tenues en dehors du nouvel arrangement. L’autre exception porte sur les vins ; non pas qu’on ait procédé pour eux comme pour les soies, car alors il n’y aurait plus eu de traité possible ; mais on a relevé le tarif