tous virent le jour dans ce Wayside home, qu’il habita depuis 1852. Il le trouvait beaucoup trop accessible et, dès que lui était signalée une visite, gagnait le bois. Un sentier propice à cette fuite devait être, prétendait-il, le seul souvenir qui resterait de lui. Certes, la belle tête léonine que reproduisent ses portraits ne donnerait l’idée ni de cette modestie, ni de cette timidité.
Entre la maison d’Emerson et celle de Hawthorne, nous nous sommes arrêtées devant Orchard-House, où demeurèrent longtemps les Alcott, Alcott, bâtisseur de mondes comme l’appelait l’oracle de Concord, qui manquait quelquefois de jugement, car ce bâtisseur de mondes ne fut pas capable de mener à bien la construction d’un simple phalanstère. On sait quelle fut la fin des expériences quasi-fouriéristes de Brook-Farm et de Fruitlands, mais l’incapacité pratique n’était pas pour détourner de lui Emerson qui faisait cas de ses théories sans croire beaucoup à leur succès. D’après Emerson, l’homme doit se renouveler intérieurement avant de pouvoir améliorer son sort extérieur. Cette certitude l’empêcha toujours de se mettre en avant pour aucune réforme, sauf celles qui touchent directement à l’être spirituel, celles qui, en faisant penser et agir les hommes, au lieu de les laisser en proie aux circonstances, les conduisent à être autre chose que de misérables accidens.
Il explique d’une façon très particulière et où perce un grain d’égoïsme le plaisir que lui procure la société d’Alcott : « Quand je cause avec lui, c’est moins pour pénétrer ses pensées que pour m’observer sous son influence ; il m’excite et je pense librement. » Aujourd’hui le nom de celui qu’il trouvait à tort ou à raison plus dieu que tous les autres, est bien oublié ; mais on se souvient de la fille d’Alcott, l’auteur charmant de ces livres pour la jeunesse qui ont été traduits en français : Little men, Little women. Je salue avec plaisir la fenêtre devant laquelle courait sa plume sans prétention.
Nous avons failli passer sans la regarder, tant son apparence est modeste, devant l’Ecole de philosophie, désormais close, où les beaux esprits de Concord se rassemblaient après la mort du maître pour évoquer ses leçons. On y entendit plus d’une belle conférence.
Après la maison de Hawthorne, presque à l’endroit où nous sommes conviés à voir le premier cep de vigne noueux et colossal d’où est sorti tout le fameux raisin de Concord, qui n’a rien de