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des ornemens ne rendent que plus grandioses, mais dont la construction a dû coûter un travail qui ne peut se comparer qu’aux travaux faits par les anciens Egyptiens pour les tombes de leurs Pharaons.

La Grande Muraille de Chine est, elle aussi, une œuvre colossale. On prend pour s’y rendre la grande route de Mongolie qui la traverse à la porte de Pa-ta-ling, à l’extrémité de la passe de Nankou. Importante voie commerciale, par où passent depuis bien des siècles les longues caravanes de chameaux qui servent au trafic de la Mongolie et de la Sibérie avec la Chine, cette route était autrefois très large et pavée, dit-on, de gros blocs de granit. On n’en aperçoit plus guère de traces, ni dans la traversée de la petite ville de Nankou où l’on s’en est peut-être servi pour la construction des maisons, ni dans la passe de montagnes où l’on grimpe ensuite péniblement et où tout a dû s’ébouler dans le torrent. Nankou est une ville murée comme la plupart de celles des environs de Pékin, comme la curieuse bourgade de Tchou-Young-Kwan qu’on traverse un peu après et sur l’une des portes de laquelle se trouve une inscription en six langues dont une n’a pu encore être déchiffrée. De toutes parts, sur les montagnes, des tours et de pittoresques fortifications en ruines témoignent que la peur des Mongols et des Tartares hantait depuis longtemps les Chinois. C’est contre eux qu’a été construite la Grande Muraille, qui se compose de deux parties, la muraille extérieure et la muraille intérieure : la première s’étend sur près de 2 500 kilomètres de Chan-haï-Kwan, sur le golfe du Petchili, jusque dans la province du Kansou, sur le haut fleuve Jaune ; sa construction remonte à deux cents ans avant notre ère ; il va sans dire qu’elle a été souvent remaniée et réparée. En pierres de taille près de la mer, elle est en briques sur la plus grande partie de son parcours et a une épaisseur de 5 à 6 mètres sur une hauteur qui n’est guère supérieure ; à l’extrémité ouest, ce n’est plus qu’une levée de terre.

La muraille intérieure, qui date du VIe siècle de notre ère, mais a été presque entièrement reconstruite par les Ming au XVIe, a 800 kilomètres de développement ; c’est elle que l’on voit à Pa-ta-ling, coupant le col où passe la route et s’éloignant à droite et à gauche pour suivre en zigzag la crête des montagnes. Elle est construite d’une manière analogue aux murailles de Pékin : un soubassement en pierre ; deux paremens