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verre d’une dimension qu’il était impossible auparavant de réaliser : découverte aussi utile à l’industrie qu’elle a été heureuse au point de vue humanitaire. Enfin la chimie est intervenue à son tour, et grâce à elle on a pu fabriquer, à des degrés de cuisson supérieurs, avec une température moins irrégulière, des matériaux plus résistans que jadis. Elle a permis, en outre, par un choix meilleur des matières premières, d’obtenir des verres de plus en plus incolores, ou bien encore elle a rendu possible l’emploi de certains corps tels que l’alumine, qui exercent des influences particulières.

Mais en dépit de ces découvertes ou de ces perfectionnemens, rien n’a été modifié d’essentiel dans la composition chimique du verre, et, sous ce rapport, les modernes n’ont guère innové, si l’on fait exception toutefois pour les verres d’optique, notamment ceux de M. Mantois.

Pour la science de l’optique, le verre est le plus précieux, le plus indispensable des collaborateurs. Que de progrès réalisés depuis le premier verre à lunette créé, dit-on, par Julien Salvino vers l’an 1300, et même depuis les études d’Euler sur l’achromatisme, ou de Fresnel qui inventa au début de ce siècle les verres lenticulaires servant à l’éclairage des phares ! N’est-ce pas au verre que l’on doit les progrès de l’astronomie et n’est-ce pas lui qui a rendu possible l’analyse spectrale, source de tant de découvertes fécondes ? n’est-ce pas grâce à lui que notre marine bénéficie de cette belle application des procédés du colonel Mangin pour les phares, les places fortes, les signaux nocturnes ? Il y a quelques mois M. Jean Rey faisait à la Société d’Encouragement pour l’Industrie nationale une intéressante conférence sur les Progrès récens de l’éclairage des côtes et l’invention des feux-éclairs, et il exposait les avantages de ce dernier système dû à M. l’inspecteur général Bourdelles, directeur du Service des phares, et qui exige l’emploi des miroirs Mangin, pour la fabrication desquels la glacerie de Saint-Gobain, ainsi que MM. Sautter et Harlé, ont une sorte de spécialité. Il n’y a pas lieu de développer ici le mécanisme des feux-éclairs qui consiste à produire des éclats aussi brefs que possible, ne dépassant guère un dixième de seconde, avec des éclipses n’allant pas au-delà de cinq secondes ; mais quand on parle des applications de la verrerie à l’optique, il convient de reconnaître la grande part qu’a prise la France dans les progrès réalisés pour l’astronomie et pour la marine.