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méthodes pourra ne pas être sans profit pour tous. De l’enchaînement des faits et des événemens qui se sont déroulés depuis un demi-siècle dans l’Afrique occidentale, elle permet en effet de dégager les procédés qui produisent les meilleurs résultats pour le territoire colonisé et pour la métropole qui l’administre.

Nul pays en Afrique n’a été, de la part des nations européennes, l’objet de tant de convoitises et le siège d’une concurrence aussi acharnée que la partie de la côte occidentale d’Afrique située au fond du golfe de Guinée. Dès 1325, des négocians de Dieppe auraient, s’il faut en croire certaines relations, fondé sur le littoral les établissemens de Petit-Dieppe, de Petit-Paris et de la Mine. Les Français auraient ainsi précédé tous les autres peuples européens à la côte de Guinée. Il est juste toutefois d’ajouter que ces premiers établissemens, s’ils ont existé, ont eu une durée éphémère. Ils ne subsistaient plus, en tous cas, quand les Portugais, en doublant, en 1432, le cap Bojador, et, en 1446, le cap Blanc, inaugurèrent l’ère des grandes découvertes en Afrique. Les Portugais commencèrent par s’établir au fort Saint-George ; ils se fixèrent ensuite sur divers autres points, et pendant près d’un siècle réussirent à accaparer pour eux seuls le commerce de la contrée et à empêcher les autres peuples de prendre pied sur le littoral. Mais, lors de la réunion du Portugal à l’Espagne, les établissemens portugais ayant été laissés sans protection suffisante par les Espagnols que préoccupait la propre défense de leurs colonies, les autres nations de l’Europe cherchèrent à s’implanter à la côte d’Afrique. Ce furent d’abord les Hollandais qui expulsèrent les Portugais d’un certain nombre de points du littoral ; puis ce fut le tour des Anglais qui occupèrent Acra en 1662 et se firent céder Cape Coast Castle à la paix de Bréda. A leur suite accoururent les Danois qui fondèrent les établissemens de Friederiksborg et de Christiansborg, et aussi des Brandebourgeois, sujets du grand-électeur, qui installèrent des factoreries au cap des Trois-Pointes. La France entra en lice à son tour et, sous le couvert d’une Compagnie, dite Compagnie d’Afrique, ouvrit des comptoirs à Assinie et à Whydah. Ainsi toutes les nations marchandes de l’Europe se sont donné, on peut le dire, rendez-vous à la côte occidentale d’Afrique et ont voulu exploiter cette région à leur profit. C’est que le commerce auquel se livraient les blancs était des plus lucratifs. La contrée fournissait en abondance les graines, le poivre, l’huile, les épices, l’ivoire, la poudre d’or, les esclaves ; les Européens livraient en