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une altitude supérieure à 4 300 mètres. Mais je pense que, vu le mauvais temps, la pression était ce jour-là descendue au-dessous de la normale, au grand dommage de notre organisme. J’estime, d’après mes autres calculs, que la pression normale en ce point doit être relevée à 457mm, 4, ce qui correspond à une hauteur de 13 500 pieds.

Cette altitude n’est en somme pas très forte, surtout pour la région. Elle est le double de celle des grands cols des Alpes, mais elle n’est pas supérieure à celle des sommets de cette chaîne. Elle est bien inférieure à celle du sommet du Mont-Blanc. En une autre saison et dans d’autres conditions, cette escalade du col de Terek-Davan est, en somme, peu de chose. Elle est relativement aisée en été, surtout maintenant que le chemin a été amélioré. Dans les conditions où nous la fîmes en 1890, en hiver et par le mauvais temps, elle fut pénible, quoique sans difficulté grave. Ce n’était, d’ailleurs, qu’un premier pas. Nous devions plus tard franchir beaucoup d’autres cols aussi hauts ou plus hauts. Mais peu d’entre eux nous parurent aussi peu abordables, surtout parmi ceux qui sont connus et fréquentés.

Si nous avons raconté cette ascension, c’est à cause de l’intérêt historique qui s’attache au nom du Terek-Davan, dont plusieurs chroniqueurs musulmans et, après eux, des historiens européens, ont fait la grande route des invasions mongoles. Il ne semble pas que la configuration du terrain se prête à ce rôle. C’est bien plutôt le Taldyk ou le Chart-Davan qui ont pu servir de voie à des armées. Nous en parlons aussi parce que c’était notre première étape dans la montagne. Bien d’autres, parfois plus dures, devaient suivre, se succédant avec monotonie. Mais celle-là était un bon spécimen d’une escalade commençant à la plaine pour arriver à une grande ligne de faîte. Enfin, c’était le passage de la barrière naturelle qui me séparait de la Kachgarie, du Turkestan chinois, de ce pays fermé et lointain, que, depuis si longtemps, je me proposais de visiter.


EDOUARD BLANC