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494 REVUE DES DEUX MONDES. n’était un péché mortel, je te dirais que tu ferais peut-être une œuvre de charité... Très sainte Vierge Marie! Quelles brutalités lais- sons-nous quelquefois échapper!... Non! ne fais pas attention, Cleto, ne fais pas attention à toutes ces fariboles que je viens de dire. Mais c’est votre faute, cuerno... Allons, va-t’en; va-t’en tout doucement, ne prends pas ces choses-là tant à cœur; calme-toi, dors... Laisse cet animal, qui ne peut te faire aucun tort en ce que tu crains; pardonne-lui... Et puis, qui sait, mon garçon, qui sait ! Aux plus profondes ténèbres succède le jour, et enfin j’irai faire un tour de ce côté-là, je sonderai le terrain, et, selon ce que je verrai... avec prudence, bien entendu, avec beaucoup de pru- dence, je t’aviserai quand je devrai t’aviser. Allons, je t’en ai dit assez. Maintenant va-t’en et laisse-moi travailler un peu. J’ai perdu assez de temps pour ce que nous gagnons. Cleto sortit moins découragé, mais non satisfait, et le prêtre s’approcha de la table. 11 s’assit et, tout en dépliant son manuscrit après l’avoir tiré du sein de l’un des vieux livres, il murmurait : — Avec de pareils entretiens et de pareilles préparations, allez donc faire quelque chose de substantiel ! et cherchez des citations latines pour en orner des discours qui frappent les auditeurs! XVI. — UN JOUR DE PÉCQE André fut le jour suivant plus matinal que le soleil et assista à la première messe, que le père Apollinaire disait à Saint-François pour les pêcheurs de la rue Haute, Muergo, qui avait été l’appeler, portait les appareils et le panier avec les provisions de bouche pour toute la journée, provisions que la capitaine avait préparées la veille au soir, comme elle en avait l’habitude chaque fois que son fils allait à la pêche. En sortant de la messe, ils virent que Mcchelin et Sotileza l’avaient aussi entendue, ce qui prouvait que tous deux seraient de la partie. Ce n’était pas d’ailleurs la première fois, car Sotileza aimait la pêche à la folie ; et, comme elle ne se plaisait à aucune autre dis- traction, qu’à la maison on la gâtait fort, et qu’André, consulté sur ce cas, approuva entièrement, tante Sidora ne mit pas d’obs- tacle aux désirs de la jeune fille, à la seule condition que, pour les convenances, elle n’irait jamais à ces promenades sans être accompagnée d’oncle Mechelin. Depuis lors, chaque fois que la