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ne trouvera rien. Or, la création de stations agronomiques ne sera pas une occasion de lourdes dépenses, les locaux existent et on n’aura aucune peine à recruter des travailleurs dans le corps enseignant des écoles.

Il s’agit donc seulement de savoir quelles sont les écoles qui seront transformées ou, en d’autres termes, quelles sont les conditions dans lesquelles une station agronomique peut faire œuvre utile.

Il ne faudrait pas objecter, comme fin de non-recevoir, qu’il existe en France des stations agronomiques et qu’on n’en a pas tiré grand profit. Il y aurait là une grande injustice, car il est nombre de stations qui ont rendu des services signalés ; il faut ajouter que la plupart de ces établissemens ne portent que le nom de station agronomique et ne sont que de simples laboratoires d’analyses, dans lesquels le directeur passe tout son temps à déterminer la composition des terres et des engrais que lui envoient les cultivateurs du pays.

Ces analyses doivent être faites, et les chimistes qui les exécutent ont moralisé le commerce des engrais et, par suite, provoqué son extension. En mettant les cultivateurs à l’abri des fraudes dont ils ont été si longtemps victimes, on les a encouragés à utiliser les engrais de commerce et ils en ont tiré grand profit. Mais on m’accordera que ce n’est pas en se bornant à analyser des matières fertilisantes qu’on deviendra capable de guider les praticiens dans leur difficile métier ; pour y réussir, il faut que la station agronomique soit établie dans un domaine où elle trouvera comme sujet d’études : des champs, des vignes, des prairies, des étables. Il faut, en outre, que dans ce domaine existent des laboratoires pourvus des instrumens de recherches indispensables.

Ce sont là des conditions nécessaires à la réussite. Le succès n’est possible que par l’association du laboratoire et des champs d’expériences. Boussingault n’a créé la science agricole que parce qu’il a fait construire des laboratoires dans ses domaines successifs de Bechelbronn et du Liebfrauenberg. Lawes et Gilbert ont élucidé la question des engrais, parce que sir J.-B. Lawes a établi un laboratoire dans son domaine de Rothamsted ; Georges Ville a eu le champ d’expériences de Vincennes. Quand M. Berthelot s’est senti attiré vers la chimie végétale, il ne s’est pas confiné dans son petit laboratoire du Collège de France, il a obtenu la