et d’encourager les natures d’élite, il n’est nullement avantageux de faire sortir de leur milieu des hommes médiocres qui, introduits dans l’enseignement, y végéteront toute leur vie, sans profit pour personne.
Il faut réduire le nombre des boursiers, aucun doute ne subsiste sur ce point ; mais, pour le réduire, il est nécessaire de diminuer le nombre des écoles pratiques. En effet, aussitôt qu’une école est construite et installée, directeur et professeurs ont le désir très légitime d’avoir des élèves et, comme les jeunes gens qui consentent à faire les frais de leur instruction sont rares, on intéresse au recrutement de l’école la commune, le département, qui sont fiers de l’avoir obtenue, et l’Etat même ; on crée des bourses, et chaque année s’augmente le nombre des déclassés.
Si on conserve sans modifications les 44 écoles pratiques ouvertes en ce moment, on verra se perpétuer l’état de choses actuel, si fâcheux, que malgré la tendance secrète qu’a toujours un ministre de louer l’administration qu’il dirige, la droiture, l’honnêteté de M. Méline lui ont arraché le cri d’alarme qui retentit dans son rapport au Président de la République.
Il existe donc de nombreux établissemens qu’on ne peut conserver sans de grands inconvéniens et qu’il est impossible de fermer. Outre qu’il serait inique d’enlever, du jour au lendemain, tout moyen d’existence à un personnel méritant et distingué, il est visible que les intérêts multiples, qui ont été assez puissans pour déterminer la création de l’école, seront assez forts pour détourner les coups qui la menacent. Mais si l’on ne peut songer à fermer les écoles pratiques qui se recrutent mal, on peut essayer de les transformer. C’est dans cette voie, au reste, que M. le Ministre pousse le Conseil. « Il faut, sur nombre de points, réformer nos méthodes ; notre enseignement tend à devenir beaucoup trop théorique, il n’est pas encore suffisamment professionnel. »
Ici, il convient de bien s’entendre ; il ne faudrait pas croire qu’on attirera les élèves dans une école où l’on se bornerait à exécuter sous leurs yeux les travaux habituels de la culture ; les praticiens sont, sur ce point, bien plus habiles que les professeurs, et les jeunes gens ne se dérangeront pas pour apprendre dans une école ce qu’ils peuvent voir chaque jour dans les fermes ; il semble, au reste, que ce serait en spécialisant l’enseignement, plutôt qu’en l’abaissant à ne plus comprendre que des recettes empiriques, qu’on attirerait les élèves. Je prends un exemple