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anglaises et l’esprit qui anime ceux qui les administrent nous permettra de donner au lecteur une idée de la situation du Royaume-Uni sous le rapport de la Dette publique et des procédés employés pour la réduire, comparée à celle des autres nations européennes et de la nôtre en particulier.


II

Négligeant la période antérieure à la Révolution de 1688, nous ne parlerons pas des expédions auxquels les rois recoururent à plus d’une reprise ni des démêlés qu’ils eurent avec le Parlement et qui amenèrent une première fois l’établissement de la République sous le protectorat de Cromwell et une seconde fois la chute définitive des Stuarts : à cette dernière époque, en 1689, la Dette n’était que d’un million de livres sterling. Deux ans après, elle avait triplé. En 1692, un acte du Parlement autorise un emprunt de 1 million garanti par les droits sur la bière et les spiritueux. L’ensemble de ces taxes devait former un fonds destiné à payer les intérêts aux souscripteurs : à la mort de chacun d’eux, l’intérêt qui lui était payé se répartissait entre les survivans, jusqu’à ce que le nombre en fût réduit à sept. À partir de ce moment, l’annuité versée à chaque titulaire faisait retour à l’État lors de son décès, si bien qu’a la mort du dernier survivant la dette se trouvait entièrement éteinte. Ce système d’emprunt n’était possible qu’au moyen d’inscriptions nominatives, seules d’ailleurs en usage, même aujourd’hui, de l’autre côté de la Manche : il n’y a point de titres au porteur pour les consolidés anglais.

Les premiers emprunts n’étaient pas contractés sous la forme de dette perpétuelle, adoptée par la plupart des nations européennes contemporaines, mais remboursables, intérêt et capital, au moyen d’un certain nombre d’annuités. C’est en 1694 qu’apparaît la dette consolidée (funded debt). La Banque d’Angleterre, fondée en cette année, commença par prêter a l’État la totalité de son premier capital, soit 1 200 000 livres, au taux de 8 pour 100 l’an ; avec la somme de 4 000 livres qui lui fut accordée pour rémunérer sa gestion de la dette, elle recevait donc une annuité totale de 100 000 livres, garantie par la perception des droits sur la bière et le tonnage des navires : ce qui lui valut le sobriquet de Banque du tonnage. En 1697, au traité de Ryswick, la dette anglaise