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calcaires. Il a repris degré par degré à l’acide silicique les bases alcalines et alcalino-terreuses que celui-ci avait fixées. Et ce phénomène continue sans cesse. Il caractérise la seconde phase de ce que G. Bunge a appelé « la lutte des deux grandes puissances de l’écorce terrestre. » Ces deux puissances sont l’acide silicique et l’acide carbonique. Ils luttent pour la possession des bases : ils luttent à chaud et à froid. Aux températures élevées, comme nous l’avons dit, c’est l’acide silicique qui l’emporte : il se sature des bases conquises. A froid, les choses tournent tout autrement. L’acide carbonique dissous dans l’eau de la mer ou des fleuves attaque les silicates, s’empare des bases et s’immobilise à l’état de carbonate terreux insoluble, si la base est terreuse ; à l’état de carbonate alcalin si l’attaque a porté sur un silicate alcalin. Mais celui-ci, en présence des chlorures terreux, est transformé en sel insoluble ; de sorte qu’en définitive le carbonate terreux est toujours le dernier aboutissant.

Dans son évolution, le globe tendant toujours au refroidissement, il en résulte que l’avantage qui appartenait, au début, à l’acide silicique, s’est dessiné de plus en plus en faveur de l’acide carbonique. Il se sature de bases et déserte l’atmosphère. La terre marcherait ainsi d’une façon fatale à l’épuisement de ses réserves d’acide carbonique libre, c’est-à-dire à l’extinction de la vie, puisque l’acide carbonique est l’aliment du végétal et celui-ci à son tour l’aliment de l’animal.

Quoi qu’il en soit de cette perspective pessimiste, ce qu’il faut retenir de ces explications c’est qu’en résumé l’azote et l’acide carbonique tendraient à diminuer sans cesse dans l’atmosphère, tandis que l’oxygène y augmenterait continuellement jusqu’à une certaine limite. Telle est la notion que la science contemporaine substitue à l’hypothèse de la fixité de composition de l’atmosphère et à l’optimisme des harmonies naturelles par lesquelles aurait été assurée à jamais cette prétendue invariabilité.


II

Nous avons dit que l’œuvre de la chimie contemporaine en ce qui concerne l’atmosphère était double. Elle a étudié plus attentivement les variations des gaz fondamentaux et de l’acide carbonique, étude qui aboutit à la réforme de l’hypothèse trop absolue de la fixité de composition. — En second lieu, elle a recherché