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catholiques dans le Céleste Empire appartient à la France[1]. Elle a charge de veiller sur la vie et les biens, non seulement des religieux français, mais de tous les missionnaires de l’Église romaine, de quelque nationalité qu’ils soient et dans quelque partie de la Chine qu’ils habitent ou voyagent. Le Saint-Siège n’a point de représentation directe auprès du Fils du Ciel : toutes les affaires intéressant la religion passent par l’intermédiaire du ministre de France à Pékin.

A l’avantage de tous, les droits de la France étaient universellement reconnus et la gratitude des missionnaires ne cessait d’attester le zèle de ses représentans, lorsque arrivèrent en Chine les premiers religieux allemands. Par une étrange ironie, c’est du Culturkampf que sont nées ces missions catholiques qui apportent aujourd’hui à l’expansion germanique un si précieux concours. Le 8 septembre 1875, un prêtre, Arnold Jansen, forcé par la persécution de quitter sa patrie, fondait à Steyl, en Hollande, un séminaire de missionnaires.

Les deux premiers apôtres qui en sortirent pour aller porter au loin la « parole de Dieu[2] » furent ce Père Anzer, aujourd’hui vicaire apostolique du Chan-toung méridional, dont le nom a si souvent depuis un an paru dans la presse, et le Père Freinademetz. Tous deux, en 1879, partirent pour la Chine ; ils obtinrent de Mgr Cosi, franciscain italien, vicaire apostolique du Chan-toung, l’administration d’une partie de sa trop vaste circonscription pastorale. L’ardeur de leur foi fut bientôt récompensée : autour d’eux, chrétiens baptisés et catéchumènes se groupèrent si nombreux que de nouveaux ouvriers durent accourir de Steyl pour aider les premiers semeurs à récolter la précieuse moisson ; de

  1. Il est inutile de refaire l’historique de l’établissement de notre protectorat religieux en Chine ; et d’ailleurs il n’y a rien à ajouter, jusqu’en 1887, à l’excellent article : Les missions catholiques en Chine, par ***, dans la Revue du 15 décembre 1880. Rappelons simplement qu’au début de ce siècle, les missionnaires étaient persécutés, traqués, qu’il en restait à peine quelques-uns en Chine, lorsque pour la première fois, par le traité de Whampoa (24 septembre 1844), le gouvernement de Louis-Philippe prit sous sa protection les religieux français. Le traité de Tien-tsin et la convention additionnelle de Pékin (26 octobre 1860) dictée par le baron Gros quand nos troupes campaient devant Pékin, confirmèrent le traité de 1844 et firent rendre aux catholiques les sanctuaires détruits. Par la force des choses, les missionnaires non français bénéficièrent de la protection de notre gouvernement ; sollicité par les religieux, encouragé et approuvé par le Saint-Siège, énergiquement exercé par nos ministres, notre protectorat s’étendit sur tous les catholiques européens et même sur leurs disciples chinois.
  2. L’association des Pères de Steyl s’appelle Gesellschaff des göltlichen Wortes.