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JOURNAL DE ROUTE
EN
ASIE CENTRALE

DU FERGANAH EN KACHGARIE

PREMIÈRE PARTIE

C’est une tâche bien ingrate, et qui, à première vue, semble peu facile, que de chercher à intéresser les lecteurs par l’aride récit d’un voyage à travers l’Asie Centrale. Soit que l’on décrive les immenses plaines poudreuses de la Tartarie, aujourd’hui dépeuplée, et où les sabots des chevaux semblent soulever la poussière de tant de peuples morts, soit que l’on entreprenne de raconter les laborieuses ascensions à travers l’interminable et colossal labyrinthe des hautes montagnes, nues et glacées, qui couvrent le cœur du vieux continent, le caractère dominant d’un pareil récit est forcément la monotonie.

Quand on lit les relations de voyage du Prince Henri d’Orléans, de M. Bonvalot, ou des compagnons de celui-ci, — les premiers Français qui aient pénétré dans ces régions inhospitalières, — il ne se dégage de ces peintures, pourtant si exactes et si consciencieusement faites, qu’une seule impression bien précise pour les lecteurs européens : c’est celle d’un voyage extrêmement dur et pénible, à travers un paysage lugubre, dont les contours