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Cette cérémonie, bien qu’elle doive avoir lieu dans le principal temple protestant de la ville, n’aura aucun caractère confessionnel. Le territoire néerlandais est l’asile de la tolérance ; il l’a d’ailleurs été presque toujours, sauf dans quelques momens de l’histoire, momens lointains heureusement, où les passions confessionnelles se sont déchaînées et heurtées partout. Aujourd’hui, la liberté de conscience est absolue. Au milieu d’une majorité protestante calviniste, les catholiques représentent les deux cinquièmes de la population, avec un appoint d’Israélites. Cette population, très religieuse dans ses différentes confessions, a toujours témoigné un grand attachement à la dynastie protestante dont les rois, de leur côté, ont pris l’habitude de traiter tous leurs sujets avec une parfaite impartialité. La cérémonie du 6 septembre conservera donc un caractère tout politique. La reine prêtera serment à la Constitution en présence des hauts fonctionnaires civils et militaires, des représentans des puissances étrangères et des membres des États Généraux. Ces derniers prononceront à leur tour, dans la forme consacrée, le serment de fidélité à la nouvelle souveraine. Puis, il y aura de grandes réjouissances. Le programme comprend un banquet et une représentation de gala à Amsterdam, une entrée solennelle à la Haye, des revues de la flotte et de l’armée, enfin tout ce qui peut relever l’éclat de ces sortes de représentations. Plusieurs sultans et princes indiens, vassaux du gouvernement des Indes, enverront des représentans qui rappelleront à la Néerlande ses possessions éloignées. Enfin, pendant plusieurs jours, le pays sera en liesse, et une fois de plus, son vieil attachement à la maison d’Orange-Nassau se manifestera pas des démonstrations qui auront le mérite d’être sincères. Puis la Hollande reprendra sa vie ordinaire, qui est tranquille et heureuse, — ce qui ne veut pas dire qu’elle soit exempte, tant s’en faut ! de passions politiques. Il y en a là comme partout ailleurs, et les partis y sont même devenus si nombreux qu’il est presque difficile d’en faire le compte. On en voit constamment naitre de nouveaux.

Il n’y en avait que deux autrefois, le parti libéral et le parti conservateur, et leurs dénominations disaient assez exactement ce qu’ils étaient. Le parti libéral était libéral. Les catholiques qui sont, nous l’avons dit, en minorité dans le pays, se rattachaient assez naturellement à lui, et obtenaient, grâce à son concours, soit dans l’ordre scolaire, soit dans l’ordre religieux, des satisfactions précieuses. Le parti conservateur était aristocrate et protestant. Autour de ces partis fondamentaux, on en voyait déjà se dessiner deux autres destinés à se développer