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proposèrent en effet de rendre un arrêt. La Cour consulta la Sorbonne, qui répondit que l’expérience seule pouvait apprendre si c’était un bien ou un mal ; et le Parlement se contenta, ce qui était une fort sage mesure de haute police, de défendre qu’on inoculât dans l’enceinte des villes. Mais, quand on est d’un certain parti, il faut déchirer et tout ce qui tient à la religion et tout ce qu’a fait cette magistrature si regrettable pour ceux qui ne sont pas de la clique.

« Le discours finit par un compliment pour moi, qui pourrait me flatter, si ce qui précède ne m’indignait pas tant et par ce qui s’y trouve et par ce qui y manque. M. Campenon, dans sa réponse, a donné maints coups de patte au récipiendaire. Mais cela ne diminue en rien mon juste mécontentement de celui-ci. Le tien, cher fils, doit être bien plus grand encore. Ce n’est pas à moi, c’est à toi qu’il avait promis de réparer par son discours la faute qui aurait dû lui mériter l’exclusion et, loin de tenir sa promesse, il a aggravé sa faute. »

Voici maintenant, dans un billet du matin, le récit d’une de ces piquantes scènes de famille qui se renouvelaient fréquemment aux Tuileries. Il s’agit d’un voyage que la Duchesse d’Angoulême voudrait faire à Bordeaux et que le Roi ne veut pas autoriser :

« Ton pauvre père a bien du chagrin, mon enfant. Hier, le Duc d’Angoulême m’a demandé une réponse définitive sur le voyage de Bordeaux. J’ai répondu par une négative fondée sur les circonstances et la cherté. Ce matin, sa femme m’en a parlé. J’ai répondu de même. Elle ne m’a pas caché que cela lui faisait beaucoup de peine. Alors je lui ai dit :

« — J’ai été parfaitement content de la conduite de votre mari dans son voyage. Me répondez-vous de tenir absolument la même ?

« Un silence trop expressif a été sa première réponse. Puis elle a ajouté :

« — J’espère que le Roi n’aura jamais à se plaindre de ma conduite ni de mon attachement pour lui.

« — Oh ! ai-je dit, je suis bien sûr de votre amitié, autant que de la mienne. Mais je crois que ce voyage ferait plus de mal que de bien. Et puis, les raisons que j’ai déjà données sont bonnes.

« L’entretien, qui a duré en tout trois minutes, car c’était