tantôt, pour n’avoir pas aperçu l’ultimatum des ultras. ; n’importe. Ta lettre m’a tué ; c’est à peine si j’ai la force d’y répondre ; je m’en vais tâcher de le faire par articles : — 1° Il est absolument impossible que tu fasses partie d’un même ministère que le duc de Richelieu. — 2° Si le Duc rentre, il faut que ce soit lui-même qui choisisse ses collègues ; ce n’est pas le Roi qui est la clef de voûte : c’est le président du Conseil. — 3° Ma répugnance pour avoir un ministre de la Maison, faisant partie du ministère, est invincible. — 4° Je te laisse carte blanche pour faire ce que tu voudras ; mais il m’est impossible de parler au duc de Richelieu. Il ne m’a pas été donné de pleurer à volonté, et si je versais des larmes, le Duc me connaît assez pour bien voir que ce serait son acceptation et non pas son refus qui les ferait couler. Je t’attends, cher fils. — Cinq heures. »
En entrant chez le Roi, après dîner, Decazes le surprit excité, agité, « la figure d’un rouge violet, les yeux injectés de sang ».
— Oh ! mon Dieu ! s’écria-t-il, qu’a donc le Roi ?
Et le Roi de répondre, tremblant de colère, en montrant la place près de son fauteuil :
— Là, tout à l’heure, mon frère, ma nièce, tous deux à genoux, me déclarant qu’ils ne se relèveraient que lorsque je leur aurais promis de te sacrifier !… On a dû m’entendre du Carrousel, tant ma réponse a été vive et emportée.
— Que le Roi se calme, supplia Decazes ; il n’a jamais eu plus besoin de ses forces et de sa présence d’esprit ; qu’il daigne m’apprendre ce qui s’est passé.
Alors, le Roi raconta qu’après le dîner, le service retiré, le Comte d’Artois et la Duchesse d’Angoulême s’étaient jetés à ses pieds, pour lui demander l’éloignement du président du Conseil. Le Comte d’Artois, qui portait la parole, avait parlé de Decazes dans les termes d’une véritable bienveillance et d’une parfaite estime.
— Je rends pleine justice à ses sentimens et à son mérite. Je reconnais que ses services pourront de nouveau être très utiles. Mais l’opinion royaliste s’est prononcée contre lui avec une telle violence qu’il est impossible qu’il fasse le bien. Je déplore qu’il soit indispensable de céder à cet orage passager ; je serai le premier à demander avant trois mois le rappel de M. Decazes. Mais, aujourd’hui, il faut qu’il s’éloigne.
La Duchesse d’Angoulême était alors intervenue :