Quelques jours plus tard, c’est un autre incident auquel est encore mêle un général, mais celui-là plus illustre que Gilly. « Je suis fâché que tu n’aies pas pu assister à la Chambre des Pairs. Mais il ne me paraît pas certain que tu eusses trouvé l’occasion d’y parler. Je suis persuadé qu’il n’y aura pas eu discussion sur l’ordre du jour. Il y aura peut-être eu un incident assez désagréable, mais où tu n’aurais rien pu. C’est une sottise du prince d’Eckmühl sur le procès-verbal[1]. » Puis, c’est la maladie du garde des sceaux qui s’aggrave. « De Serre moins bien me fait de la peine ; mais mon bon fils vraiment mieux me fait tant de plaisir que la balance penche de son côté. Je ne te donne point quittance du portefeuille pour ce soir. Je t’aime trop pour cela. » Grâce à cette amélioration de sa santé, Decazes peut se mettre activement à la besogne pour l’achèvement de la loi électorale. « Travaille, mon ami, travaille. Je ne sais ce qu’en dira ton père ; mais, le Roi est sûr que tu feras de bonne besogne et d’avance, il voit tout l’Hellespont blanchissant sous nos rames. » Mais, le lendemain, — 19 janvier, — nouvel arrêt dans les progrès du mieux que le Roi constatait avec tant de joie. Il est encore privé du plaisir de revoir son fils : « Mon Dieu ! s’écrie-t-il, quand finiront et ma cruelle souffrance et ce jeûne qui n’est qu’un accessoire ? Tiens, tu sais le peu de cas que je fais de Gall. Dubois est un grand chirurgien ; mais cela ne me prouve pas qu’il soit bon médecin et je ne puis croire qu’ils te traitent bien. Par pitié pour moi, appelle des médecins fameux comme Portal, comme Halley ; je ne respirerai qu’après leurs ordonnances. Je t’aime tant. » Mais, voici, le même jour, qui est plus fâcheux encore : « J’allais fermer, lorsque Porlal le médecin est venu me rendre compte de l’état de De Serre. Détestable. On le condamne à partir pour Nice. »
Dans l’état des affaires et des partis, ce départ du grand orateur dont tout le monde dit que seul il peut déterminer les Chambres à voter la loi électorale est une véritable catastrophe. Le 21 janvier, le Roi, au moment de se rendre à la messe commémorative de la mort de Louis XVI, reçoit une lettre du garde des Sceaux, lettre d’adieux et de regrets. Il l’envoie à Decazes qui ne peut, vu l’état de sa santé, assister à la cérémonie. « Voici la lettre
- ↑ Dans la séance du 18 janvier, le maréchal Davout avait qualifié de misérables les ailleurs d’une pétition demandant l’abrogation, pour cause d’inconstitutionnalité, de la loi contre les régicides.