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solution tchèque, de la crise austro-hongroise, s’ajoute donc ce formidable empêchement intérieur : la guerre des Tchèques et des Allemands. Et c’est pourquoi cette solution est loin d’être aussi simple qu’elle le paraîtrait d’abord ; mais, en outre, le fût-elle, — et fût-elle acceptée à Vienne, à Budapest et par les Allemands de Bohême, — elle ne serait pas définitive, ce ne serait pas une solution, et dès le lendemain l’agitation recommencerait.


II

Elle n’aurait changé que d’objet ; au lieu d’un régime à trois, elle aurait désormais pour but un régime à plusieurs, ou à tous ; au lieu de tendre au trialisme, du jour où le trialisme serait fondé, elle tendrait au fédéralisme. Mais ce fédéralisme même, quel serait-il ? Serait-il intégral ou partiel ? Autrement dit, les dix-sept Pays de la Cisleithanie y entreraient-ils, tous sans exception, et quelle que soit leur importance ? ou bien n’introduirait-on comme alliés ou confédérés sous l’Empire et l’Empereur que les groupes les plus importans ? Dans ce dernier cas, quelle serait la mesure ? la statistique ou l’histoire, le rôle joué dans le passé ou le montant de la population ?

Si les dix-sept Pays devaient tous entrer dans l’Empire fédératif, y entreraient-ils de plain-pied, ou bien établirait-on entre eux une échelle de valeur ? En d’autres termes, ferait-on de l’Autriche une espèce de Suisse impériale, en dix-sept Cantons ou Pays, conventionnellement proclamés égaux, en dépit de l’histoire, de la statistique et de l’économie politique ? ou bien une espèce d’Allemagne impériale, sans princes alliés, mais avec un Conseil fédéral où les voix seraient réparties inégalement, suivant des règles et des proportions à fixer ?

Et si les dix-sept Pays n’étaient pas admis comme confédérés, que deviendraient ceux qui seraient exclus ; des États de seconde ou de troisième classe, États protégés ou bailliages communs comme dans l’ancienne Confédération helvétique ? Mais ceux-là, en vertu de quoi les exclure ? et ceux mêmes que l’on admettrait, sous quelle forme les reconnaître ? Compterait-on par royaumes ou par nationalités ? La Bohême, par exemple, ne ferait-elle qu’un ; ou distinguerait-on entre Tchèques et Allemands ? N’y aurait-il qu’un royaume de Galicie ; ou séparerait-on les 3 900 000 Polonais des 3668 000 Ruthènes ? Mais, si l’on ne comptait que par royaumes