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valaient d’être pesées, on a procédé par division. 295 députés, contre 272, ont « approuvé les déclarations du gouvernement ». — Majorité en faveur de M. Méline, 27 voix. — Puis on est passé au second morceau : « et résolue à pratiquer une politique de réformes démocratiques fondée sur l’union des républicains » ; adopté par 527 voix contre 5. « Vivent les Cinq ! J’en suis ! », s’est écrié M. de Baudry d’Asson ; et encore, vérification faite, les Cinq n’ont plus été que trois : MM. de Baudry d’Asson, Paul de Cassagnac et de Largentaye. Il n’y avait plus qu’à rejoindre les deux bouts et à faire voter sur l’ensemble ; alors les choses se sont gâtées. Deux radicaux d’arrière-plan, MM. Ricard (Henri, de la Côte-d’Or ; ne pas confondre avec M. Ricard, Louis, de la Seine-Inférieure) et Bourgeois, du Jura (ce n’est point du tout M. Bourgeois, Léon, de la Marne), un pseudo-Ricard et un pseudo-Bourgeois ont déposé la motion suivante : Ajouter à l’ordre du jour de M. Ribot : « et appuyée sur une majorité exclusivement républicaine ». Le gouvernement jusqu’ici avait tout accepté, mais cette invitation de MM. Bourgeois et Ricard, il la décline. La motion n’en est pas moins votée par 295 voix contre 246. — Majorité contre M. Méline : 49 voix. — Une exclusion en amène une autre et, prenant aussitôt le contre-pied, un progressiste, M. Dulau, propose d’ajouter à cet ajouté : « en dehors du parti socialiste ». M. Méline s’y refuse « pour les mêmes raisons de principe », et M. Dulau ne recueille que 36 voix contre 492.

D’où il résulte, quand on récapitule : 1° que M. Méline a une majorité de 27 voix ; 2° qu’il est en minorité de 49 voix ; et, à un autre point de vue : 1° que la droite peut être incluse dans la majorité (puisque la Chambre approuve les déclarations du gouvernement) ; 2° qu’elle n’en est pas formellement exclue (puisque la Chambre veut l’union des républicains, mais que, cette union, la droite ne l’empêche pas) ; 3° et pourtant qu’on l’exclut expressément et nominalement (puisque la Chambre ne reconnaît qu’une majorité exclusivement républicaine) ; 4° enfin, que la Chambre a moins de sainte horreur pour les socialistes que pour la droite ; et cela donne tout de suite sa mesure. La confusion n’a pas été moindre dans les scrutins que dans les débats : les radicaux, qui, naturellement, n’ont pas « approuvé les déclarations du gouvernement », ont recommandé à ce même gouvernement « une politique de réformes démocratiques fondée sur l’union des républicains », puis lui ont imposé de ne s’appuyer que « sur une majorité exclusivement républicaine » ; et ensuite, lorsqu’on a voté sur l’ensemble, comme il comportait une approbation du gouvernement, quoi qu’ils lui eussent, l’instant d’avant, recommandé ou imposé, ils ont repoussé tout en bloc.