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LE PEUPLE GREC.

habitans ou les emmènent en esclavage. Bulgares et Valaques ravagent la Grèce à plusieurs reprises ; les Slaves s’établissent en divers endroits. À la fin vient le Turc. Il fait disparaître, autant qu’il le peut, les grandes familles byzantines, qui pouvaient lui nuire ; il n’épargne que le paysan, dont il avait besoin pour se nourrir. Les classes supérieures disparaissent des villes ; les uns fuient à l’étranger, d’autres, qui sont restés, sont malmenés ou se font mahométans, passent même à l’ennemi. Les montagnes furent le refuge des moins soumis et des plus vaillans, ce qui augmenta le nombre des Klephtes. Montagnards et marins devaient être plus tard les héros de la Guerre d’indépendance.

M. A. Berthelot conclut de ces faits que les Grecs anciens ont été exterminés par les guerres et par les révolutions sociales, ou éliminés par la transformation du régime de la propriété. Leurs esclaves, d’après lui, ont fini par les remplacer. Les Grecs, très humains, laissaient leurs esclaves fonder des familles, à tel point que Xénophon conseille de restreindre cette faculté. À mesure que les maîtres disparaissaient dans les guerres, les serviteurs durent les remplacer. La population composite résultant de ces mélanges était constituée à la fin de l’empire romain. Malgré l’introduction ultérieure des Slaves, des Albanais, des Latins, cette population forme encore la majorité des Grecs actuels. Il est donc exagéré de prétendre, avec Fallmerayer, que les Grecs contemporains descendent uniquement de Slaves grécisés. Ils n’ont qu’une certaine quantité de sang slave proprement dit et descendent des Grecs de l’Empire romain, par exemple de ceux du temps de Justinien. Ces derniers ont fourni environ la moitié de leur sang et ont imposé leur langue, leurs mœurs, aux autres élémens plus ou moins hétérogènes. D’après la carte ethnographique des pays grecs, publiée par la Société pour la propagation des lettres grecques en 1878, les Romains et les Serbes sont nettement circonscrits, les Bulgares dominent de Misch à Vorna, occupent même la partie nord-ouest de la Macédoine, la contrée qui a pour centre Philippopolis, toute la Thrace et le sud-est de la Macédoine. Le sud de l’Albanie, Chypre et enfin la Crète, sujet de la dernière guerre, seraient en majorité hellènes ; mais on voit qu’il s’agit d’un hellénisme de seconde ou troisième main, altéré par de très nombreux mélanges.

Une chose certaine, c’est que l’indice céphalique (rapport de la largeur à la longueur du crâne), qui est d’importance majeure