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En ce qui touche l’organisation des services : 1° l’armement et l’équipement des troupes ; 2° les moyens d’assurer leur marche, leurs communications entre elles et avec l’ennemi, leurs retranchemens, leur campement (service d’ingénieurs spéciaux ; sapeurs, pontonniers, télégraphistes, aéronautes, etc. ; service du train ; entretien et remonte de la cavalerie et service attenans) ; 3° une administration qui assure les fournitures de toutes sortes, vivres et munitions, où et quand il convient ; 4° un service de santé et ses dépendances (hôpitaux, ambulances, etc.) ; 5° le recrutement des effectifs calculés d’après la qualité des hommes et les forces ennemies ; 6° l’appui d’un bon système de positions fortifiées à la frontière et à l’intérieur ; 7° enfin et surtout, un commandement dont l’efficacité soit assurée par la transmission prompte et l’exécution fidèle des ordres.

Voilà le colosse aux milliers de têtes que l’initiative d’un seul homme doit mettre en mouvement.

J’implore l’indulgence des spécialistes pour les lacunes qu’ils ne manqueront pas de relever dans ce recensement improvisé et aussi pour l’impropriété du langage. Ma plume est dépaysée dans leur science. Il suffit à mon objet que l’imagination et la mémoire soient ici réveillées au profit du bon sens qui, dans ce travail, sera, faute de mieux, mon seul guide.

Les deux premiers facteurs, définis plus haut, de la puissance d’une armée, joints au respect spontané du commandement, constituent chez l’individu ou la nation l’esprit militaire, et j’aurai à considérer les influences sociales sur cet esprit.

Je ne m’occuperai que de l’efficacité du commandement, confiée jusqu’à présent dans toutes les armées à la hiérarchie et à la discipline.

Ces deux institutions ont pour objet d’assurer la cohésion, l’unité des forces militaires de toutes sortes, afin de les tenir le plus rapidement et le plus sûrement possible à la disposition du plus haut chef et de ses subordonnés ; elles ont pour condition l’obéissance indiscutée, dite passive. Une telle obéissance, pour être librement accordée, suppose un acte de confiance et un acte de foi par lesquels chaque militaire, conscient de l’insuffisance de ses propres lumières, délègue à ses supérieurs, en tout ce qui concerne le service, l’entière direction de sa volonté pour le meilleur succès final de l’action commune. Cette délégation est le fondement de la puissance d’une armée.