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sera d’autant plus grand que cette hauteur de terre, au-dessus du sous-sol filtrant, sera plus considérable.

La sécheresse est donc l’ennemie des terres reposant sur un sous-sol perméable ; quand ce sous-sol devient imperméable, c’est le défaut contraire qui apparaît, les terres sont exposées à se gorger d’eau et à n’être plus bien aérées ; cet inconvénient ne se rencontre toutefois que si le sous-sol imperméable est horizontal ; s’il est incliné, l’égouttement se produit et les terrains ainsi disposés sont prédestinés, ainsi que nous le verrons, à l’établissement des prairies permanentes.

Quand une terre d’une médiocre épaisseur repose sur un sous-sol imperméable et plat, les travaux d’assainissement s’imposent ; tant qu’ils ne sont pas exécutés, les eaux restent stagnantes, forment des marécages, l’insalubrité est extrême.

Les landes de Gascogne en fournissent un exemple célèbre : elles sont formées d’une grande plaine unie, dont le sol sablonneux repose sur un agrégat de sable et de matière organique, absolument imperméable, désignée sous le nom d’alios. Entre cette plaine et la mer se dresse un cordon littoral de dunes, aujourd’hui boisées, qui oppose un obstacle absolu à l’écoulement des eaux vers l’Océan ; or, les vents d’ouest amènent sur le pays, pendant tout l’hiver, des pluies abondantes ; elles formaient des mares stagnantes, et, pour les éviter, les habitans avaient pris l’habitude de se jucher sur des échasses. Pendant l’été, les eaux de ces marécages s’évaporaient laissant par places des flaques, dans lesquelles pullulaient les miasmes paludéens ; la population clairsemée, misérable, était consumée pas la fièvre.

C’est ce pays qu’a transformé l’ingénieur Chambrelent, que nous n’avons possédé que pendant peu d’années à l’Académie des sciences ; appelé par son service des ponts et chaussées dans le département des Landes, il reconnut que quelques plantations de pins maritimes, ne donnant que des sujets souffreteux dans les lieux bas, présentaient au contraire une croissance régulière dans les endroits élevés, par suite plus secs. Visiblement, pour mettre le pays en valeur, il fallait tout d’abord le débarrasser des eaux stagnantes ; Chambrelent reprit le nivellement de toute la contrée, reconnut que, contrairement à l’opinion admise jusque-là, les Landes s’inclinaient légèrement au nord vers la Gironde, au sud vers le bassin d’Arcachon ; il fit creuser un vaste réseau de fossés d’écoulement, à profil très évasé, pour empêcher les sables de les