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désagrégation des roches sédimentaires, infiniment plus tendres, plus faciles à entamer que les roches anciennes.

Les géologues nous apprennent que pendant des milliers et des milliers d’années les eaux ont corrodé, disloqué, entraîné, dissous les roches primitives, puis lentement aux époques de calme, ont abandonné dans les profondeurs des océans les matériaux soustraits aux parties émergées. Des sables, des argiles, des calcaires se sont déposés au fond des mers, y ont formé des couches de centaines de mètres de hauteur ; puis, quand par suite des dislocations de la croûte terrestre, ces mers se sont retirées, les épais sédimens qu’elles avaient formés ont émergé. A leur tour, ils ont été attaqués, creusés par les eaux qui constamment ont roulé sur leur surface.

Echauffée par les radiations solaires, l’eau de l’Océan se transforme en vapeur ; la voilà mobile : participant à tous les mouvemens de l’atmosphère, elle arrive au-dessus des continens ; invisible d’abord, au moindre refroidissement elle devient brouillard, puis nuage et, si la température baisse encore, se condense en pluie. L’eau atteint le sol et, entraînée par la pesanteur, retourne vers la mer, dont elle provient. Cette circulation incessante de l’eau de l’Océan à la terre, puis de la terre à l’Océan, a profondément modifié le relief des terrains. En descendant les pentes, l’eau leur arrache des matériaux, quelle abandonne ensuite lorsque, à son arrivée dans les parties basses, elle ralentit son mouvement. Il suffit de voir, après un orage, les quantités de limons qui viennent des hauteurs, pour comprendre que, soumises pendant des siècles à ces remaniemens constans, les roches sédimentaires qui couvrent la plus grande partie de notre planète aient formé, à l’aide de tous les matériaux susceptibles d’être charriés par les eaux, un mélange de sable, d’argile et de calcaire, en proportions infiniment variables.

Aux substances ainsi arrachées aux roches par action chimique ou mécanique, s’ajoute un quatrième élément provenant de l’activité des êtres vivans qui, depuis les temps géologiques, se sont succédé à la surface du globe. La vie y est partout répandue. Il n’est pas de pierre qui, dans les pays humides, ne soit recouverte d’une mince couche de lichens ; ils prélèvent sur l’atmosphère de l’acide carbonique, avec l’aide des bactéries de l’azote, et laissent à leur mort un premier résidu de matières organiques. Les végétaux d’un ordre plus élevé abandonnent aussi