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avait quitté en hâte la Guyomarais le lendemain de l’inhumation ; depuis lors on n’avait pas eu de ses nouvelles. Cet étranger n’avait-il pas livré au gouvernement révolutionnaire les noms des associés et révélé leur rôle dans le complot ? Fontevieux, comme on sait, n’était pas Breton, et, en se laissant aller à l’accuser sur de simples apparences, les pauvres femmes obéissaient à un sentiment bien naturel ; il répugnait à leur noble caractère de supposer qu’un de leurs compatriotes se fût rendu coupable d’un crime si odieux : le traître, à leur avis, devait donc être l’Allemand Fontevieux.


Or, le malheureux, incarcéré depuis les premiers jours de mars, était alors écroué à l’Abbaye et occupait un cachot situé exactement au-dessus de celui des dames Desilles. Il avait été informé de cette particularité par les geôliers ou par son défenseur, et il s’ingéniait, sans y réussir, à communiquer avec elles, soit pour concerter quelque moyen de salut, soit pour les assurer simplement de sa fidélité et de son amitié. Un jour, les dames Desilles virent descendre, à travers les barreaux de leur fenêtre, un modeste bouquet de roses, suspendu à un fil auquel était également lié un papier. C’était une lettre de Fontevieux : le prisonnier, en des termes remplis « d’intérêt et d’attachement », leur apprenait qu’il était leur voisin et s’informait de leurs santés. Elles rattachèrent au fil fleurs et billets, après avoir tracé au verso de la feuille cette question :

« — Êtes-vous un de nos dénonciateurs ? »

A peine le message fut-il parvenu à sa destination, qu’elles entendirent à l’étage supérieur « un grand bruit, et beaucoup de mouvement », et, le lendemain, elles apprirent que Fontevieux « avait été saisi d’une attaque de nerfs, d’épouvantables convulsions dont il avait failli mourir, n’ayant pu supporter la pensée que ses amis le soupçonnaient d’une pareille infamie ».

La vie se passait ainsi, pour les prisonniers, dans des alternatives angoissantes de découragement et d’espérance : ils se sentaient entourés d’ennemis inconnus, et ils n’ignoraient pas aussi que des amis tenaces s’employaient à les sauver.

Les défenseurs de Pontavice avaient réuni une somme de dix mille livres pour faciliter son évasion ; mais cet acompte, augmenté d’une promesse de 1500 francs de rente, n’avait pu séduire le gendarme chargé de sa surveillance : d’un autre côté, Lalligand, qui ne tenait pas à ce qu’on guillotinât ses cliens,