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constate en ce moment même chez leurs adversaires ; et il n’y a point de danger qu’un croiseur battant le pavillon aux trois bandes rouge et jaune perde en une seule nuit, relâchant à Cadix, trente cinq déserteurs, comme cela est arrivé dernièrement à un croiseur au pavillon étoile qui touchait barre à New-York.

Quant aux officiers, outre que l’Espagne en a autant qu’il lui est nécessaire, tandis que l’augmentation des cadres, augmentation immédiate, urgente, figurait au premier rang des réformes proposées par M. Davis Long, ils sont parfaitement à la hauteur de leur tâche, et leur valeur individuelle ne le cède en rien à celle des officiers de l’Union.

Voyons maintenant l’organisation générale.

Que l’Espagne bénéficie encore, malgré ses embarras financiers, malgré certaine nonchalance, certaine apathie des organes administratifs, des anciennes et sérieuses traditions de sa marine, qu’elle ait notamment au Ferrol, à Cadix, à Carthagène des arsenaux mieux pourvus que ceux de Brooklyn, de League-Island, de Norfolk, de Marce-Island, etc., c’est ce qu’il serait difficile de contester. D’ailleurs, que si ces arsenaux ont le désavantage d’être fort loin du théâtre probable des opérations, du moins existe-t-il à la Havane un arsenal suffisant pour faire de ce grand et beau port une base secondaire des plus précieuses, bien supérieure, en tout cas, à celle que peut fournir Key-West.

Supérieure, oui, mais surtout à la condition qu’il y existe un bassin de radoub. Or cela est encore douteux. A la fin de l’année dernière, on y vit arriver un grand dock flottant, capable de recevoir des navires de 10 000 tonnes ; le Pelayo, le Carlos-V pouvaient par conséquent y nettoyer leur carène, y réparer une avarie majeure. Mais voilà que, peu de jours après, lorsqu’on voulut faire les essais définitifs de cet énorme berceau en tôle, il coula à pic et ne put être relevé. Espérons que, depuis quatre mois, de nouveaux efforts ont été couronnés de succès.

Il était bien tard déjà, en décembre 1897, pour se procurer un outillage si indispensable aux opérations maritimes, et ce n’est malheureusement pas là le seul reproche qu’ait à se faire, dans la préparation d’une guerre inévitable, l’administration de la marine espagnole.

Quand on jette les yeux sur une carte de l’Atlantique et de la Méditerranée américaine, la mer des Antilles, on voit tout de suite que la Havane est très enfoncée dans l’ouest, et que si elle