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16 à 17 nœuds, très fortement blindés, pourvus d’une belle artillerie, en un mot fort capables de prêter le flanc aux navires similaires les mieux réussis des flottes européennes. Les cinq cuirassés en construction, du type Kearsage, ne diffèrent guère des précédens que par le dispositif de l’artillerie. Au reste, ne nous y appesantissons pas, étant fort probable qu’ils ne pourront prendre aucune part à la lutte qui s’engage.

Les cuirassés de 2e classe Maine et Texas, un peu plus anciens que l’Indiana et ses frères, ne déplaçaient que 6 500 ou 7 000 tonnes, et on leur reprochait d’avoir voulu prendre, pour cette taille réduite, un armement trop lourd, qui paralysait leurs facultés nautiques. On sait dans quelle catastrophe mal éclaircie a disparu le Maine, et que c’est là l’incident décisif qui, dans les grandes crises, ne manque jamais de servir à point nommé les desseins agressifs de l’un ou de l’autre des adversaires.

Bien supérieurs à tous égards au Maine et au Texas, peut-être même à l’Indiana ; — en tout cas, ne craignons pas de le dire, aux bâtimens européens de leur catégorie, sauf justement l’Emperador Carlos V, — les deux croiseurs cuirassés New-York et Brooklyn font le plus grand honneur à l’indépendance, à l’élévation du concept militaire des marins américains.

Ce sont des coques de 8 600 (New-York) à 9 300 tonnes (Brooklyn), partiellement revêtues d’un blindage d’épaisseur moyenne en acier durci, taillées pour les grandes vitesses, 21, 22 nœuds même, avec un rayon d’action considérable ; du reste formidablement armées, si l’on admet qu’il vaut mieux disposer de 8 canons de 203 millimètres à tir accéléré, comme le Brooklyn, que de 4 pièces monstres de 330 millimètres à tir lent, — sans préjudice, bien entendu, d’une superbe batterie de canons moyens et de nombreuses pièces légères.

Comme rien n’est parfait dans ce monde, pas même les croiseurs cuirassés de grand style, malgré la juste faveur dont ils jouissent, on pourrait reprocher aux deux américains une distribution un peu défectueuse du cuirassement, l’étonnante hauteur de leurs cheminées, trait caractéristique qui les dénonce de trop loin, les vibrations énormes de leurs coques aux grandes allures ainsi que l’insupportable chaleur qui règne dans les machines.

Quant au bélier cuirassé Katahdin, c’est encore un type de bâtiment qui avait beaucoup fait parler de lui, type étroitement spécialisé pour le combat par le choc, ce qui est peu judicieux,