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insectes, aux tarets, à l’eau, comme le goniaké qui y durcit à la compression, comme le rônier, le seul qu’avec le cailcédrat ou faux acajou, les Européens emploient spécialement, le reste n’étant que « combustible ». Il faudrait installer des scieries mécaniques près des chutes d’eau, connue a fait le gouvernement à Koulikoro.

Beaucoup de plantes servent à la sparterie, à la teinture, à la médecine : le kinkéliba semble souverain contre la fièvre bilieuse hématurique, ce fléau du Soudan. Et que de produits alimentaires ! Le karité donne un beurre végétal inaltérable à la chaleur ; le baobab, le néré de la farine ; le kolatier un alcaloïde plus puissant que la caféine, dont les Européens, qui l’ignoraient il y a quinze ans, usent déjà presque trop. Bananiers, papayers, goyaviers, ananas foisonnent ; l’oranger vient dans le haut Sénégal, le dattier au nord du Soudan. Un palmier donne du vin. Les indigènes cultivent le blé dans la région de Tombouctou, le mil dans tout le Soudan, le foulo dans le sud, le maïs un peu partout. Le riz s’est extraordinairement répandu depuis vingt ans dans les plaines basses à inondations périodiques. Le sorgho, vers Tombouctou, dépasse un cavalier monté. Ajoutez à cela arachides, patates, ignames, manioc, haricots, courges et nombre d’autres plantes indigènes ou récemment acclimatées, et vous verrez la prodigieuse quantité et variété de vivres que le Soudan peut fournir. C’est la certitude de pouvoir nourrir une population dense, et d’exporter en Europe de nouveaux alimens. Dès à présent le caféier, qui réussit merveilleusement sur la côte et sur les pentes du plateau, le kolatier, le bananier, le karité, semblent en ce pays cultures de grand avenir.

L’industrie y trouvera son compte aussi. Dans toutes les forêts, des arbres ou des lianes fournissent du caoutchouc, et souvent de qualité supérieure ; huit espèces sont déjà connues, plusieurs autres semblent fournir un suc analogue à la gutta-percha de Malaisie ; ce serait un coup de fortune pour le Soudan. Le cotonnier vient partout dans les terrains maigres, trop nombreux. Pour faire adopter aux cultivateurs la variété longue soie, les autorités françaises en donnent des graines dont on acceptera les produits comme impôt. Déjà ils ont d’habiles tisserands et teinturiers (l’indigotier est très répandu) et font même de belles cotonnades. Ils améliorent aussi leur tabac ; celui de Virginie, planté par eux à notre école, fait prime au loin. Voilà donc des cultures qu’ils