catholiques. La force même de la réaction qui venait d’abattre le parti révolutionnaire le servit. La nouvelle Chambre — par ses projets sur le droit d’aînesse, le milliard des émigrés, la censure — donna à son royalisme cet air d’ancien régime, et la loi du sacrilège vint prouver à quelles terribles conséquences cette assemblée poussait la logique de l’union entre l’Église et l’Etat. A Louis XVIII succédait Charles X, qui n’avait cessé de représenter dans la famille royale les prétentions de la monarchie absolue. Une jeunesse longtemps orageuse avait préparé à ses vieux jours une piété faite de regrets ; il portait dans sa dévotion le rigorisme qui avait manqué à ses mœurs, et, pour expier les fautes du prince, voulait accroître la foi du peuple. Ce zèle catholique donnait un exemple, où certains virent un ordre. On fut parfois incertain si des gens pieux étaient en faveur parce qu’ils étaient capables, ou s’ils paraissaient capables parce qu’ils paraissaient pieux. L’hypocrisie, dont le masque change avec les temps, et qui sous la Révolution affectait l’athéisme, crut avoir intérêt à se convertir. Voilà les nouveautés dont on pouvait aisément faire peur à la France : il suffisait d’exagérer où il y avait des apparences, et, où il n’y avait rien, d’inventer. Les imprudences de langage furent dénoncées comme l’aveu de combinaisons profondes, les espérances de quelques-uns comme la pensée de tous ; les doctrines ultramontaines trouvèrent soudain auprès des incrédules l’importance que leur refusaient alors les catholiques ; les complaisances que le gouvernement, en cela semblable à tant d’autres, montrait pour les amis bruyans de ses doctrines religieuses, devinrent un objet de scandale. Une « congrégation » qui datait du Consulat avait formé à Paris, entre un petit nombre de chrétiens fervens, un lien de prières ; quelques-uns étaient de vieille noblesse et, quand revinrent les Bourbons, retrouvèrent crédit à la cour : la faveur qu’ils devaient à leur naissance fut attribuée à leurs habiletés pieuses. Les autres confréries, ouvertes dans le royaume à la mysticité ou à la bienfaisance catholiques, furent accusées de couvrir les mêmes intrigues. La Propagation de la Foi, œuvre alors nouvelle, commençait grâce au zèle de nombreux collecteurs, à former, avec des quêtes d’un sou, ses gros budgets ; ses adhérens furent fort surpris d’apprendre qu’au lieu de préparer la conversion des peuples infidèles, ils travaillaient à asservir leur propre pays au « parti prêtre » ; on affirma que toutes ces sociétés, reliées les unes aux autres, et toutes à celles de Paris, étaient les mailles
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