Durant le règne de Louis XVIII, les circonstances favorisèrent « l’union du trône et de l’autel ». Les plus obsédés par la crainte de la théocratie ne pouvaient reconnaître l’image d’un inquisiteur en ce prince souriant, ancien philosophe, resté faible aux licences de l’esprit comme d’autres vieillards aux tentations de la chair, dévot qui lisait son bréviaire dans Horace. Il ne poussait pas plus à l’extrême la religion de sa royauté. Une seule fois depuis l’octroi de la Charte, il avait mis sa prérogative au-dessus d’une volonté exprimée par la France : c’était pour dissoudre la « Chambre introuvable ». Il avait choisi ses ministres et les Pairs parmi des hommes parvenus comme lui à la tempérance des doctrines et persuadés que tout comprendre est ne rien exagérer. Ces gages rassuraient la masse de la nation. L’ennemi de la monarchie et de l’Église, le parti révolutionnaire, avait à peu près omis d’opposer à cette quiétude une propagande d’idées, absorbé qu’il était dans toute l’Europe par sa politique de complots. Ses échecs avaient consolidé partout les couronnes, unies par Metternich en une sainte alliance contre la Révolution, et nulle part celle-ci n’avait été vaincue plus qu’en France. Huit ans de révoltes sévèrement réprimées avaient diminué le nombre et l’énergie des conspirateurs militaires que leur culte pour « l’ancien » rendait rebelles à tout autre maître ; Napoléon était mort, l’armée nouvelle avait, depuis la guerre d’Espagne, fait sa paix avec le drapeau blanc. La France, lasse de ces troubles et humiliée d’être prise pour dupe par les révolutionnaires qui, tout en sollicitant ses suffrages et se déclarant ses serviteurs, travaillaient pour eux seuls, exerça ses représailles contre les libéraux, complices ou dupes des démagogues. Dix-neuf seulement, aux élections de 1824, rentrèrent dans la Chambre.
Le parti révolutionnaire changea alors de tactique. A poursuivre les chances désormais épuisées des violences, il n’avait réussi qu’à s’aliéner l’opinion. Il achèverait de se perdre s’il essayait ouvertement de la tourner contre la royauté et le catholicisme. Mais la France mêlait à sa tradition monarchiste la crainte de l’ancien régime, et à sa tradition religieuse la crainte de la théocratie. Cette double répugnance offrait, à qui saurait l’exploiter, prise sur le plus grand nombre des royalistes et des