Page:Revue des Deux Mondes - 1898 - tome 146.djvu/779

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le repos du dimanche devient obligatoire[1]. Le droit d’association n’existe pas, mais les établissemens ecclésiastiques peuvent être reconnus par le gouvernement, devenir propriétaires[2], et, tandis que les autres affiliations sont poursuivies et dissoutes, les ordres religieux se reconstituent, protégés, dans la confusion de textes contradictoires, par la bienveillance du gouvernement. L’enseignement n’est pas libre, mais des évêques sont ministres de l’instruction publique, et l’Etat partage son monopole universitaire avec l’Eglise : les religieux sont autorisés à donner l’enseignement primaire[3] ; les évêques, à instruire par des maîtres à leur choix, dans une école ecclésiastique par diocèse, les enfans qui se destinent au sacerdoce[4] ; ces petits séminaires se multiplient au-delà du nombre fixé d’abord et s’ouvrent non seulement aux futurs ecclésiastiques, mais à tous les élèves, que la piété des familles y conduit. Enfin les diocèses accrus en nombre, l’augmentation des crédits destinés aux cultes, la présence des dignitaires ecclésiastiques au Conseil d’Etat, à la Chambre haute, à la cour, les hommages publics rendus à Dieu dans les solennités nationales, attestent la foi religieuse du gouvernement. Mais en respectant l’Eglise, il la régente. Il demande aux professeurs des grands séminaires l’engagement d’enseigner les quatre articles de 1682. Il invite les évêques à concerter avec lui leurs mandemens. Le cardinal de La Tour d’Auvergne est l’objet d’un « appel comme d’abus » pour avoir, dans une lettre pastorale, demandé la suppression des articles organiques, c’est-à-dire réclamé la mesure que le roi, quelques années avant, voulait prendre. Cette censure s’exerce sur le Pape lui-même : quand Léon XII annonce au monde catholique le jubilé de 1825, le gouvernement ne laisse pas publier la bulle en France, qu’elle n’ait été examinée par le Conseil d’Etat. Et la synthèse du régime apparaît quand Charles X suit, derrière le clergé, la procession de ce jubilé pour lequel il vient de soumettre à ses légistes la majesté pontificale. Bref le pouvoir n’accorde pas à l’Église des libertés qui la rendraient indépendante ; il lui concède, sous forme de privilèges, certains partages de l’autorité qu’il garde ; il mesure l’étendue de ces faveurs à ce qu’il estimera utile pour lui, il se réserve le moyen d’accroître ou de réduire la vie

  1. Loi du 18 novembre 1814.
  2. Loi du 2 janvier 1817.
  3. Ordonnance du 29 février 1817.
  4. Ordonnance du 5 octobre 1814.