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ruine de votre industrie. Mais hier encore, un grand industriel, mon collègue, répondait à mes questions : « Cette loi a été un « bienfait pour tout le monde. » Je vous assure que quelle que soit la durée de ma vie, quel que puisse être mon sort, je resterai toujours à votre service. »

Ces paroles sont l’expression vraie de la pensée de Mundella : mais il semble que les orateurs de 1884 aient été un peu optimistes. La question de la limitation des heures de travail pour les adultes n’était pas tranchée par la loi de 1875 et ne l’est pas encore aujourd’hui. En 1888 et 1889, il se trouva une majorité aux Congrès des Trade-Unions de Bradford et de Dundee pour repousser une proposition en faveur du Eight Hours bill (loi des huit heures) : Burt et Howell l’ont énergiquement combattue et ce n’est qu’à partir de 1890, que les Trade-Unions l’ont insérée dans leur programme. Mundella ne partagea pas leurs hésitations et il fut un de ceux qui soutinrent devant la Chambre des communes le bill des huit heures. Il s’est expliqué très nettement à cet égard et affirmait que le travail limité qui permet de demander aux ouvriers un maximum d’effort a l’avantage de tirer tout l’effet utile des machines et est essentiellement favorable aux patrons. La crise actuelle prouve que tous les industriels ne partagent pas cette manière de voir.

Il n’était pas moins absolu dans les questions d’enseignement. Toute sa vie, il fut partisan des nouvelles lois qui ont rendu l’instruction obligatoire en Angleterre, et à ses débuts au Parlement il avait soutenu le bill Forster qui ne lui donnait pourtant qu’une satisfaction incomplète.

Malgré leurs divergences sur les questions sociales, Gladstone avait la plus grande estime pour Mundella et considérait son concours comme indispensable à cause de la popularité dont il jouissait parmi les ouvriers. Aussi, après les élections de 1880, il n’hésita pas à le faire entrer dans le cabinet en lui confiant le portefeuille de l’Instruction publique. Mundella profita de son court passage au ministère pour contribuer dans une large mesure à l’adoption des lois scolaires actuellement en vigueur. Il fut nommé membre du Conseil privé et, après sa sortie du ministère, il fut élu sociétaire de la Royal Society, honneur auquel il attachait un grand prix et qu’il avait mérité par son dévouement à la cause de l’enseignement public. Lorsque les whigs revinrent aux affaires en 1886, il fit partie du ministère comme président