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reconstitue en sens inverse l’itinéraire par lequel il a été amené et retrouve son domicile.

Citons l’un des nombreux faits de ce genre qui nous ont été rapportés par des témoins dignes de foi.

Un jeune chien appartenant à M. D…, propriétaire à Pont-Audemer, est amené à la gare de Beaumont-le-Roger et de là sur un terrain de chasse situé entre Goupillières et Fumechon. Il disparaît pendant la chasse et rentre le soir à Pont-Audemer. Or, il a été possible de reconstituer son itinéraire grâce aux observations fortuites de quelques employés de chemin de fer et garde-barrières qui ont remarqué son passage. Le chien s’est rendu d’abord à la gare de Beaumont-le-Roger, puis a longé la voie ferrée jusqu’à Pont-Audemer en passant par Serquigny. Pour gagner la gare il a dû tourner le dos à sa maison ; il a ensuite longé la voie en effectuant un parcours considérable et en traversant plusieurs fois la Rille, alors que de Fumechon il pouvait très directement gagner Pont-Audemer par un itinéraire infiniment plus court[1].

Les migrations des oiseaux ont été l’objet d’observations trop connues pour que nous les relations : nous allons nous borner à expliquer, avec l’aide de notre théorie, les faits acquis depuis longtemps.

L’oiseau migrateur est soumis, comme ses congénères qui habitent constamment une même région, à la loi du cantonnement. Seulement il a deux domaines, une résidence d’été et une résidence d’hiver : on a constaté que ce sont toujours les mêmes hirondelles qui viennent chaque année occuper le même nid et habiter le même centre. La même remarque a été faite pour les cigognes et bien d’autres oiseaux.

Quand l’heure du départ a sonné, les oiseaux de la même espèce habitant la même région se rassemblent pour le voyage. Ceux qui ont déjà effectué le trajet prennent la tête et suivent en sens inverse l’itinéraire qui les a amenés. Les animaux plus jeunes, nés depuis le voyage précédent, se bornent à suivre leurs aînés. Et quand, quelques mois plus tard, il s’agira de revenir, ils seront à leur tour capables de reprendre le contre-pied du chemin pratiqué précédemment.

L’oiseau migrateur né dans notre climat et n’ayant encore

  1. Quand, un jour de marché, des paysans égarent le chien qu’ils ont amené en ville, ils vont le chercher aux différens points où leur voiture a stationné et le retrouvent toujours.