Après quinze audiences consécutives, le jury de la Seine a pu enfin rendre son verdict dans le procès Zola. Le verdict a été affirmatif, sans admission de circonstances atténuantes : M. Zola a été condamné à un an de prison et à 3 000 francs d’amende, c’est-à-dire au maximum de la peine. Le jury a donc jugé qu’il avait commis le maximum du délit qui lui était imputé. Bien peu de personnes, en France du moins, protesteront contre ce jugement. Il faut laisser de côté la personne de M. Zola, malgré la préoccupation qu’il a eue de la mettre en avant. Il ne s’agit même pas de savoir s’il était ou s’il n’était pas de bonne foi, ni de refaire le procès Dreyfus, ni de recommencer le procès Esterhazy. Le jury, en présence d’une question nettement déterminée : oui ou non, M. Zola a-t-il commis contre les principaux chefs de l’armée et contre tout un conseil de guerre, le délit d’injure et de diffamation ? ne pouvait faire qu’une réponse. Le délit était incontestable ; il était évident et criant ; il avait blessé au cœur tous ceux qui tiennent aux conditions d’existence de notre armée, et qui ont confiance en elle. Dès lors, la condamnation ne faisait pas de doute : elle a été dure, elle devait l’être.
Nous n’avons pas cessé de protester contre la manière dont cette affaire a été menée par ceux qui voulaient la faire aboutir à la manifestation de l’innocence du détenu de l’île du Diable. Au lieu de procéder par les voies normales et purement juridiques, ils ont employé des manœuvres révolutionnaires. Trouvant l’armée comme un obstacle sous leurs pas, ils ont essayé de lui passer sur le corps. S’ils se sont crus habiles et adroits en adoptant cette conduite, ils peuvent mesurer aujourd’hui l’étendue de leur erreur. Mais pourquoi l’ont-ils adoptée ? On n’ôtera pas de l’esprit des simples que, s’ils ont usé de pareils moyens, c’est qu’ils n’en avaient pas d’autres à leur disposition, et l’inanité des preuves qu’ils ont produites, lorsqu’ils ont été mis au pied du mur, confirme cette manière de voir. Ils