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sont intimement liées les destinées du pays, de qui dépendent toutes nos espérances, vers laquelle doivent converger tous les respects. Si le rôle qui lui appartient n’était pas de lui-même assez évident, il n’y aurait besoin pour le mieux comprendre qu’à regarder autour de soi. Car tous ceux qui, entretenant on ne sait quelles coupables chimères, emportés par un esprit de révolte et de folie, rêvent de jeter à bas cette société, sans savoir s’ils pourront sur ses ruines reconstruire l’édifice, tournent leurs efforts contre l’armée en qui ils sentent le suprême instrument de résistance. Il faut donc que nous tous tant que nous sommes nous nous serrions contre elle ; il faut que nous ayons confiance en elle et dans ses chefs ; il faut qu’elle ait confiance en nous. Il y a dans le Désastre un épisode plus douloureux que tous les autres et dont le souvenir surnage par-dessus tant de souvenirs atroces : c’est celui d’une mêlée où un officier français tombe sous les coups des Français. Comprenons-en le symbole et ne laissons pas partir de nos rangs des traits lancés contre notre armée. Le livre de MM. Paul et Victor Margueritte est utile, parce qu’il est un acte de foi dans l’armée. Cela même doit nous servir de règle d’appréciation, puisque aussi bien on ne nous a pas appris encore que l’Europe eût proclamé l’universel désarmement. Quiconque a resserré les liens entre l’armée et la nation, celui-là a fait œuvre de bon Français, et on doit l’en remercier. Mais quiconque a tenté de diminuer le respect que l’armée nous inspire, d’y introduire la démoralisation et de faire planer le soupçon sur la loyauté de ses chefs, celui-là a fait œuvre mauvaise, désertant son poste sous l’œil de l’ennemi vigilant et réjoui, attiré sur sa tête une lourde responsabilité, et pour sa part livré un peu du sol de France.


RENE DOUMIC.