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LA DERNIÈRE DES CONDÉ

DERNIERE PARTIE[1]


VII

La santé de Mlle de Condé, quelque temps ébranlée par cette vive secousse, se rétablit assez vite ; mais ses dispositions morales restèrent profondément altérées. La gaîté de sa jeunesse, calme et douce, mais réelle et soutenue, s’éteignit entièrement. L’animation habituelle de sa physionomie fit place à une « mélancolie invincible[2] », et l’on assure que, depuis ce moment, nul ne la vit jamais rire. Une transformation non moins remarquable fut celle qui s’opéra dans ses sentimens religieux. La ferveur naïve rapportée jadis du couvent de Beaumont s’était en effet promptement affaiblie, au contact de ceux avec qui elle avait vécu depuis lors. La piété, chez les Condé, n’était guère en honneur ; et la défunte princesse, — dans la correspondance dont j’ai cité quelques extraits au début de cette étude, — déplore en maint endroit la « tiédeur » d’un époux qui, bien qu’ « assistant parfois de corps à la grand’messe », lui donne, dit-elle, « bien de la bile par son indévotion ». Moins édifiant encore est le duc de Bourbon, qui ne garde même pas le respect des convenances extérieures et scandalise la Cour par la liberté de ses propos. Entourée de ces exemples, la princesse Louise, pendant de longues années, se contenta, semble-t-il, d’une religiosité vague, fort à la

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  1. Voyez la Revue du 1er février 1898.
  2. Archives nationales. — Archives de Chantilly, de Beauvais. — Manuscrit de Arsenal. — Histoire des derniers Condé, par Crétineau-Joly. — Introduction aux Lettres intimes de Mlle de Condé, par M. P. Viollet, etc.
  3. Baronne d’Oberkirch, Mémoires.