En Russie, un ukase de Pierre le Grand attribuait au tsar régnant le choix de son successeur.
Les formes de la république elles-mêmes sont bien multiples. Qu’y a-t-il de commun, si ce n’est le nom, entre la république plébiscitaire de la Suisse, dans laquelle toutes les lois fondamentales sont soumises à la sanction du peuple, et la république démocratique des États-Unis, conduite par un président responsable, sans faste royal, mais investi d’un pouvoir considérable ; ou la république semi-monarchique de 1875, ayant à sa tête un chef sans pouvoir réel, mais se mouvant selon le protocole royal, escorté par des cuirassiers, reçu dans les villes par une armée et des coups de canon ?
Ce n’est pas tout. Certains peuples ne se sont pas laissé enserrer dans les deux termes du dilemme, ils les ont brisés et ont dit : Ni république, ni monarchie, mais un mélange, un gouvernement mixte. Les Vénitiens ont fait ainsi sous l’étiquette républicaine, et les Anglais sous l’étiquette monarchique. Le procédé anglais est surtout instructif. Partout ailleurs, les peuples n’avaient trouvé d’autre remède à l’absolutisme royal que l’abolition de la royauté. Les Anglais changèrent le roi, incorrigiblement absolu, et maintinrent la royauté sous un roi de leur choix. Mais cette nouvelle royauté devint une espèce de république. Le roi, en conservant toutes les prérogatives honorifiques et gouvernementales, perdit l’omnipotence : il fut assujetti à des ministres responsables devant le Parlement, juge et arbitre des affaires. On eut ainsi deux chefs : le roi, héréditaire et inamovible, le premier ministre, électif et temporaire ; à l’un l’éclat, à l’autre la force du pouvoir. Ainsi l’on jouit à la fois de la stabilité protectrice de la monarchie et des mobilités fécondes de la république.
Donc, dire monarchie ou république, c’est poser une interrogation complexe, à laquelle on ne peut faire qu’une réponse confuse ou ambiguë. La véritable manière de poser le problème est : Vaut-il mieux à la tête d’une nation un chef temporaire ou un chef permanent ?
Se prononce-t-on pour le chef temporaire, l’élection s’impose, sauf à débattre le meilleur mode. Préfère-t-on un chef permanent, il y a lieu de se demander s’il sera institué par l’élection ou par l’hérédité, sauf à rechercher le meilleur système d’élection ou d’hérédité, et à corriger par des institutions les turbulences