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parvinrent à gagner les bois. Les deux autres, formés en carrés, furent enfoncés et sabrés ; leurs débris se sauvèrent dans les bois, dont une compagnie du 1er régiment de la Prusse Occidentale occupait la lisière. En les poursuivant, Letort reçut une balle dans le ventre, qui le jeta mortellement blessé à bas de son cheval. Les dragons adoraient ce chef doux et intrépide ; ils vengèrent sa mort en massacrant avec une joie féroce tout ce qu’ils trouvèrent à portée de leurs longues épées.

Pendant ce combat, les dragons d’Exelmans, brigades Burthe et Vincent en tête, débouchaient au-dessus de Chatelineau, culbutaient le régiment de dragons du colonel Moïsky, chassaient un bataillon du bois de Pironchamp et le rejetaient sur Lambusart. Toutes les troupes de Pirch s’étant ralliées là, l’ennemi fit tête. Attaqué simultanément par les dragons d’Exelmans et par la cavalerie légère de Pajol qui avait dépassé à leur droite les colonnes de Vandamme, il se replia sur Fleurus. Grouchy avait conduit en personne l’attaque de droite. Bien que le jour déclinât, il voulait emporter Fleurus et pousser les Prussiens jusqu’à Sombreffe, selon les ordres de l’Empereur. Mais Vandamme, qui avait déjà commencé d’établir ses bivouacs entre Winage et les bois de Soleillemont, refusa formellement d’aller plus loin, disant que ses troupes étaient trop fatiguées et que d’ailleurs « il n’avait point d’ordres à recevoir du commandant de la cavalerie. » Grouchy, ne pouvant attaquer Fleurus sans infanterie, fut contraint de s’arrêter à deux portées de canon de ce village. Les corps d’Exelmans et de Pajol bivouaquèrent en première ligne, couvrant l’infanterie de Vandamme, entre Lambusart et Campinaire.


VII

L’aile gauche n’avança pas non plus aussi loin que le voulait l’Empereur. Le 1er hussards, envoyé de Charleroi sur la route de Bruxelles, avait rencontré vers une heure et demie, au-delà de Jumet, la cavalerie du colonel Lutzow qui couvrait la concentration à Gosselies de la division Steinmetz. Les uhlans ramenaient assez vivement les hussards, lorsqu’ils furent chargés et repousses à leur tour par les lanciers de Pire, avant-garde du corps de Reille. Reille pressa la marche de son infanterie, parvint entre deux et trois heures à portée de canon de Gosselies et fit ouvrir le feu contre ce village. Au moment où les colonnes d’attaque