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réserve se joindra à celle-ci de façon que la bataille tourne au désavantage de l’ennemi. Pendant ce temps, la troisième armée continuera d’avancer, et celle qui aura subi un échec se rétablira et reprendra ensuite sa marche offensive. »

Wellington désirait qu’on commençât les hostilités sans attendre l’arrivée de l’armée russe et avant même que les trois autres armées eussent achevé leur concentration. « Il suffit, écrivait-il, le 10 avril, de porter entre la Sambre et la Meuse 60 000 Anglo-Hollandais, 63 000 Prussiens et 140 000 Austro-Bavarois pour nous trouver en France avec des forces supérieures à celles de l’ennemi et pouvoir manœuvrer dans la direction de Paris. » Très préoccupé des intérêts de Louis XVIII, Wellington jugeait que chaque nouveau jour de trêve affermirait le pouvoir de Napoléon, et, croyant à l’importance de la prise d’armes des royalistes dans le Midi, il pensait qu’il la fallait seconder par une action immédiate sur les frontières du Nord.

A Vienne, on n’était pas si pressé. On voulait faire cette guerre sans risques. On voulait, dans chaque bataille, être au moins trois contre un. Le conseil de guerre tenu le 17 avril, sous la présidence du tsar, décida que pour donner aux différentes armées le temps d’opérer leur concentration, on ouvrirait la campagne seulement le 1er juin. C’était un mois de perdu, selon Wellington et Blücher, un mois de gagné selon Knesebeck et Schwarzenberg. Ce dernier comptait même gagner encore un autre mois par les discussions du plan stratégique. En effet, le 7 juin, alors que Blücher, enragé de rester inactif en Belgique où il avait eu cependant la distraction d’une révolte des Saxons, multipliait ses lettres au roi de Prusse pour le conjurer de lui envoyer des ordres de mouvement, Schwarzenberg faisait adopter par les souverains, réunis à Heilbronn, un plan définitif dont l’exécution devait commencer seulement du 27 juin au 1er juillet.

D’après ces nouvelles dispositions, six armées franchiraient simultanément les frontières de la France : l’armée des Pays-Bas (93 000 Anglais, Hanovriens, Nassaviens, Brunswickois et Belges[1], sous Wellington) par Maubeuge et Beaumont ; — l’armée prussienne (117 000 hommes[2] sous Blücher) par

  1. Il y avait en outre, stationnés à Anvers et dans les villes de Flandre, 12 000 hommes (dont quatre brigades de landwehr hanovrienne) qui ne devaient point être appelés à entrer en campagne.
  2. En deuxième et en troisième ligne, les Prussiens avaient la (larde royale, les corps de Kleist (plus tard de Harke), de Louis de Hesse-Hombourg, d’York et de Tauenzien, et la landwehr du Rhin non encore organisée : ensemble 124 000 hommes, dont 70 000 seulement (la garde et les corps de Kleist et d’York) devaient successivement entrer en France.