Page:Revue des Deux Mondes - 1897 - tome 144.djvu/932

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

hautes qualités militaires du jeune capitaine. Et lorsque, quelques semaines plus tard, celui-ci dut quitter l’état-major du général Thomas pour aller à Washington, où l’appelait un ordre du secrétaire de la Guerre, voici la lettre qu’il fut chargé de remettre au général Halleck, commandant en chef les armées de l’Union :


Chattanooga. Tennessee, le (novembre 1863.

« Au major général H. W. Halleck, général en chef. — Le capitaine Horace Porter, qui vient d’être relevé de son service d’officier d’ordonnance principal à la division de Cumberland, m’est représenté par tous les officiers qui le connaissent comme un des jeunes gens les plus méritans et les mieux doués de l’armée. Les officiers généraux sont unanimes à exprimer le désir de le voir promu au grade de général de brigade, et maintenu ici. Je n’hésite pas à joindre ma recommandation aux leurs, et à demander qu’on veuille bien l’attacher à mon état-major. J’ai précisément besoin d’un officier tel qu’on me dit qu’est le capitaine Porter, et, si on m’y autorise, je serai fort heureux de le garder près de moi. Je suis, etc. Ulysse Grant, major général. »

Mais le général Halleck n’entendait pas laisser à ses subordonnés le droit de se former eux-mêmes leur état-major. Il ne fit nulle attention à la lettre de Grant, et ce fut seulement en mars 1864, six mois après, que celui-ci, créé lieutenant général des armées de l’Union, put enfin librement réaliser son désir. Il s’empressa de prendre pour aide de camp le capitaine Porter, qui, depuis ce jour jusqu’à la fin de sa première présidence, ne le quitta plus, l’assistant, le secondant fidèlement dans la paix comme dans la guerre.

Nommé colonel le 24 février 1865, et, le 13 mars, général de brigade, « pour ses galans et précieux services dans le champ durant la rébellion », secrétaire particulier de la Présidence de 1869 à 1873, l’aide de camp du général Grant est aujourd’hui ambassadeur des Etats-Unis à Paris. Mais ni l’âge, ni les fatigues d’une carrière militaire et civile glorieusement remplie ne lui ont fait perdre cet amour passionné des lettres qu’il affirmait déjà lorsque, en 1860, cadet à l’école militaire de West-Point, il publiait un volume de vers. Et voici qu’après un grand nombre d’études historiques et philosophiques, le moment lui a semblé venu d’offrir à ses compatriotes une relation détaillée des mémorables événemens dont il a été le témoin depuis son entrée à l’état-major du général Grant. A l’aide de notes prises tous les soirs sous la tente, il a reconstitué pour ainsi dire heure par heure l’histoire des douze derniers mois de la guerre de Sécession, et