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IV

La question qui doit se poser maintenant est celle de savoir si la création de ce port maritime est utile.

Il est certain que sur ce point nous trouvons depuis Henri IV jusqu’à nos jours une unanimité de sentimens complète.

Elle est fondée sur le fait que le navire a toujours été considéré comme opérant les transports les plu » économiques, et peut-être plus encore sur le désir des négocians de la capitale de faire eux-mêmes leurs affaires sans intermédiaire.

Or, à l’heure actuelle, nous pouvons traduire en chiffres aussi bien le fait que le désir ; nous avons pour cela tous les élémens nécessaires.

Le fret moyen à la mer peut être établi pour un cargo-boat, genre de navires qui constituera le mouvement principal du port de Paris, sur le pied de un dixième de centime par tonne et par kilomètre[1].

Dans un canal maritime, quoique la vitesse doive y être réduite — c’est-à-dire la consommation de charbon moindre qu’à la mer, — doublons ce prix, c’est-à-dire portons-le à 0 fr. 002. Pour les 185 kilomètres qu’aurait la longueur de la Seine canalisée et approfondie entre Rouen et Paris, cela ferait par tonne 0 fr. 37, c’est-à-dire 370 francs pour un navire de 1 000 tonnes de jauge. Ne comparons pas ce prix à celui qu’aurait coûté en 1840 le camionnage de 1 000 tonneaux sur la route royale (il eût été de 45 000 francs) ; mais nous pouvons mettre en regard son transport à l’heure actuelle par chalands et par la voie ferrée.

Le prix que coûte un tonneau de marchandises par kilomètre est estimé à 0 fr, 0125, lorsqu’il est mis sur un chaland.

En lui faisant suivre le thalweg de la Seine, il devra parcourir une distance de 218 kilomètres, ce qui élève le prix à 2 fr. 725, — ou 2 725 francs pour 1 000 tonneaux ; — mais ce chiffre doit être majoré de 750 francs pour un transbordement inutile avec le navire, soit, en tout, 3 475. Ajoutons que le navire de 1 000 tonnes de

  1. Nous prenons le kilomètre pour unité de longueur pour faciliter les comparaisons. A la mer, on compte par milles de 1852 mètres.
    La navigation dans les lacs du Nord de l’Amérique se fait à l’heure actuelle sur le taux de un vingtième de centime par tonne et par kilomètre avec des navires de 2 500 et de 3 000 tonnes.