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Entre les années 1835 et 1845, ce fut une fièvre de demandes de concession, suivie bientôt d’une débâcle forçant le gouvernement à intervenir.

Quelques marins pensaient pourtant encore à la navigation de la Seine ; M. Guibert, en 1842, remontait le fleuve avec un navire à deux qu’illes, construit à Bordeaux, et dont le tirant d’eau était de 2m,50 : mais cette tentative ne fut pas renouvelée, les maigres du fleuve ne pouvant être franchis lorsque les eaux étaient basses.

Treize années plus tard, un projet sérieusement étudié fut présenté par Belgrand.

Nous ne le connaissons, il est vrai, que par les rapports émanant du conseil général des Ponts et Chaussées (l’original ayant probablement été brûlé en 1871 dans l’incendie de l’Hôtel de Ville) ; mais ils suffisent pour faire connaître le but et les moyens que comptait employer le savant auteur des études sur le régime de la Seine pour faire arriver à Paris les navires que Rouen pouvait recevoir en 1855.

Cette ville n’était à cette époque qu’un simple port de cabotage ; les navires de 6 et 7 mètres de tirant d’eau pouvaient bien venir mouiller devant Quillebeuf, mais non remonter au delà, empêchés qu’ils étaient par une série de seuils, formés par des sables, des graviers ou de la tourbe. Les seuls navires d’un tirant d’eau inférieur à 3m,50 pouvaient décharger leurs marchandises sur les quais de Rouen. Belgrand, sans vouloir toucher au service du bas du fleuve, déclarait que Paris devait suivre la fortune de la capitale de la Normandie, et son projet était à peu près la reproduction de celui dû à Frimot, avec la différence qu’il coupait, comme l’avait proposé le comité, en 1825, les deux boucles du fleuve : Argenteuil-Sartrouville, Tourville-Oissel. La compagnie du chemin de fer de l’Ouest, avait en effet, à cette époque, déjà pris possession de la vallée de la Seine, et faisait épouser par ses rails, dans les deux boucles, le tracé de l’ancien projet de 1825 ; il fallait que le nouveau canal longeât la voie ferrée, pour ne pas être obligé de la placer sur des ponts tournans.

En ce qui concerne les autres bases de son projet, Belgrand, estimant que deux navires peuvent se croiser avec un écartement de 3m,40, donne au canal une largeur au plafond de 25 mètres, et place des tabliers mobiles à tous les ponts qu’il croise.

Le conseil général des Ponts et Chaussées prit tout d’abord le