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association avec la France, le plus possible de principautés et d’abbayes allemandes. Les armées de l’archiduc débordant leurs frontières, la peur de l’Autriche l’emporta. Le tsar Paul avait montré quelques velléités de protéger la Bavière ; mais il apprit que le défunt électeur avait aboli l’ordre de Malte. Cet ordre était alors son jouet politique préféré. Il chassa l’envoyé bavarois de sa cour, ordonna à ses troupes d’occuper la Bavière et consentit que l’Autriche prit la garde de cet État pendant la guerre. L’Autriche avait accepté un morceau en Bavière des mains des Français ; elle ne demandait qu’à en recevoir un plus gros morceau des mains des Russes. Elle voyait les Allemands terrifiés ; elle en profita. Les légations françaises passaient, à Vienne, pour des foyers d’espionnage, de propagande, de conspiration contre l’Empire. L’archiduc Charles, à mesure qu’il avançait, les balaya. Bâcher fut expulsé de Ratisbonne, Alquier de Munich, Trouvé de Stuttgart.

Le Directoire s’obstinait à tenir à Rastadt. Talleyrand écrivit aux plénipotentiaires, les 8 et 10 avril, de rester jusqu’à la dernière extrémité ; puis, s’ils étaient contraints de partir, de protester, de se retirer à Strasbourg, de s’y déclarer toujours prêts à négocier avec l’Empire et avec chacun de ses membres, même par correspondance, enfin de manifester des dispositions bienveillantes aux États d’Allemagne qui ne feraient point acte d’hostilité. C’était le vieux jeu des divisions de l’Empire. L’Autriche était décidée à y couper court. Une dissolution du Congrès en eût été le seul moyen régulier ; mais cette dissolution ne se pouvait opérer sans le concours de la Prusse et de ses co-Etats de l’Allemagne du Nord ; or Thugut ne voulait rien leur demander. Il se contenta de rappeler les représentans de l’Empereur. Il aurait dû, en même temps, notifier, loyalement, que l’Autriche cessait de considérer Rastadt comme un territoire neutre. Le plénipotentiaire impérial, Metternich, se contenta de rompre les négociations, le 8 avril. Le journal de Carlsruhc l’annonça, le 10, avec cette remarque : « La neutralité du lieu du Congrès cessant, les ministres français n’y séjourneront vraisemblablement pas longtemps. »

Metternich quitta Rastadt le 10. Il s’agissait de faire partir les Français. Il s’agissait surtout de se débarrasser des agens officieux qu’ils gardaient, çà et là, en particulier à Stuttgart, l’envoyé hollandais Strick et le Danois Wœchter. Pour obtenir l’expulsion