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un débouché de 381 000 tonnes. Que dire si le canal latéral à la Loire atteignait Saint-Etienne et appelait ses houilles dans l’ouest ! L’intérêt commercial, déjà si grand, n’est pas seul en cause ici : nos chantiers de construction de la Loire ne peuvent dépendre de l’Angleterre ; les nouveaux travaux de Saint-Nazaire vont ouvrir ce port à nos cuirassés, il leur faut donc y trouver du combustible en tout temps. Enfin lorsqu’on parle de houille, on ne doit pas calculer la consommation présente. Amenez-la dans un pays à bas prix, et du coup y naîtront de nouvelles industries.

Mais la région de la Loire contient encore d’autres ressources minérales. Peu de métaux, il est vrai, sauf dans le haut cours et un peu dans le cours inférieur. Mais les matériaux de construction donneraient un fret abondant : les granites de la Vienne, de la Loire-Inférieure, des départemens du cours supérieur, du Morvan ; le porphyre, les roches volcaniques (comme la pierre de Volvic) de l’Auvergne ; le marbre de Sablé ; le tuffeau, les meulières[1] des coteaux d’Indre-et-Loire surtout ; le calcaire dur de Château-Landon par le canal du Loing ; la chaux (qui serait si utile aux champs de Bretagne et de Sologne) d’Angers, de Montjean. Ajoutons enfin les ardoises d’Angers, de Trélazé, qui, avec celles des Ardennes, approvisionnent presque toute la France. Donnez de l’eau, et les bateaux chargés à plein bord de lourds minéraux sillonneront le fleuve d’un bout à l’autre.

Les bois circulaient jadis beaucoup sur la Loire. Aujourd’hui la Loire-Inférieure n’en reçoit plus que des pays scandinaves : 80 000 t. peut-être. Une seule papeterie de Nantes emploie 75 000 stères de sapin de Norvège. Le Massif central, le Nivernais pourraient produire beaucoup sans exploitation excessive, et la Sologne devrait fournir à la papeterie, au chauffage, et même exporter pour les mines anglaises, insatiables consommateurs de bois de soutènement. Nantes traite aussi les bois de chêne et de châtaignier pour la tannerie ; une seule usine en a 8 000 t. en réserve. Cette industrie grandirait si, pour l’alimenter, on avait d’autres bois que ceux de la Bretagne, péniblement amenés par le canal de Brest.

La culture se développerait à proportion. La Mayenne et la Sarthe produisent des orges de première qualité ; elles ne peuvent les exporter ni même les amener à bas prix à Nantes, où la brasserie

  1. Cinq-Mars en exporte jusqu’en Amérique.