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chose ? Est-ce pour rien ? Dans le doute, nous faisons le contraire de ce que conseille le proverbe : au lieu de nous abstenir, nous reproduisons toutes les hypothèses, mais nous ne choisissons pas

S’il fallait choisir, nous croirions volontiers que le voyage du comte Goluchowski n’a pas grande importance en lui-même. On a assuré, dans quelques journaux, qu’il avait pu être provoqué par la publication de M. Frassati ; mais c’est ce qu’il nous est impossible même de comprendre. L’article de M. Frassati n’avait jeté sur les rapports de l’Italie avec l’Autriche aucune ombre qui eût besoin d’être dissipée. Au reste, il a été suivi de près par un article de M. Crispi, dans la Nineteenth Century, qui a fait suffisamment justice des critiques méchantes dont la Triple Alliance avait pu ailleurs être l’objet. Jamais encore elle n’avait été mieux célébrée. M. Crispi a fait là, vraiment, toute sa confession ; on y a vu le fond de sa pensée et de son cœur ; mais sa pensée a paru affaiblie et son cœur sujet à d’étranges égaremens. En somme, son article a été jugé négligeable, et nous n’en parlons que pour mémoire. Ne faut-il pas parler un peu de tout dans une chronique ? On y signale aussi bien un homme qui s’en va qu’un homme qui arrive, celui qui descend de la scène et celui qui y fait sa première apparition. M. Crispi n’a pas voulu s’en aller discrètement et sans rien dire ; en quoi peut-être il a eu tort, car sa grosse voix s’est perdue au milieu des autres. Quelle différence avec M. de Bismarck ! De celui-ci rien ne se perd, et, dans l’intérêt de l’histoire, nous voudrions toujours qu’il parlât davantage. Si ce qu’il dit n’est pas édifiant, c’est bien instructif ! Mais n’insistons pas : ce serait lui faire injure que de le comparer à M. Crispi, même pour l’en distinguer.


FRANCIS CHARMES.


Le Directeur-gérant,

F. BRUNETIERE