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et de quantité insuffisante ; de même, ses chemins de fer ne sont ni assez développés, ni assez réguliers dans leurs services. Le pays est peu sûr au point de vue politique, et, au point de vue économique, il est déchu... Nous ne pensons pas que l’Allemagne commette l’erreur de faire grand fond sur un tel allié. » Et la Gazette de Francfort conclut par un mot que nous hésitons à reproduire : « L’Italie a grandi par les défaites ; qu’elle continue ! » Ce n’est là qu’un journal sans doute, mais la plupart des autres ne sont pas plus bienveillans. Le Berliner Tagblatt, par exemple, déclare ne se faire aucune illusion sur le degré de sympathie de la grande majorité des Italiens à l’égard de l’Allemagne. « Pour eux tous, dit-il, la politique de la Triplice ne peut être suivie qu’à contre-cœur : c’est une combinaison contre nature, tout au plus un mal temporairement nécessaire. » Contre nature, l’alliance l’est assurément pour l’Italie, et la Gazette de Voss le comprend si bien à son tour, que, pour l’y maintenir, elle cherche à réveiller dans son esprit la crainte du danger le plus chimérique. » Si les Italiens, écrit-elle, estiment qu’ils n’ont plus d’inquiétude à avoir au sujet du maintien de l’intégrité de leur territoire, et, en particulier, au sujet de la possession de Rome ; s’ils jugent qu’ils n’ont plus à redouter d’être traités en vassaux par la France, rien ne les rattache plus à la Triple Alliance. » C’est, on le voit, le spectre français que les journaux allemands dressent et agitent comme un épouvantail devant les yeux de l’Italie, et ils croient, après cela, pouvoir tout se permettre avec leur alliée. A supposer que la France, à une époque que nous connaissons mal, ait traité l’Italie en vassale, ce n’est plus à elle aujourd’hui qu’on peut adresser ce reproche. Et quant à la question romaine, pour savoir où on ne se résigne pas encore à la considérer comme résolue, il ne faut pas se tourner du côté de Paris, mais du côté de Vienne. On s’est remis à parler ces jours-ci, à propos du voyage du comte Goluchowski à Monza, de la visite que l’empereur d’Autriche n’a pas encore rendue, depuis seize ans, au roi Humbert et à la reine Marguerite. Nous doutons qu’il la leur rende jamais, et tout le monde sait pourquoi. Il est commode aux deux alliés de l’Italie de mettre sur le compte de la France les torts qu’ils peuvent avoir à son égard, mais il est surprenant qu’elle s’y laisse toujours tromper.

Parmi les journaux allemands, les Dernières Nouvelles de Leipzig doivent être mis à part des autres, et méritent une attention particulière. L’ermite de Friedrichsruhe passe pour être fréquemment l’inspirateur de cette feuille, et l’article qu’elle a publié semble bien porter la