Page:Revue des Deux Mondes - 1897 - tome 144.djvu/455

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

outillage, en augmentant à la fois le nombre de ses succursales et les facilités qu’elle donne au public pour virer et compenser les dettes et les créances entre toutes les places allemandes. Nous pourrions la signaler comme un modèle, au point de vue des rapports financiers avec le gouvernement : bien que celui-ci soit tout-puissant dans l’administration de la Banque, elle n’a pas avancé un centime au Trésor ; son actif se compose de ses espèces et d’un portefeuille exclusivement commercial[1]. L’organisation de la Reichsbank au point de vue de l’émission des billets est entièrement différente de celle de la Banque de France. Cette émission est doublement limitée : elle ne peut dépasser le triple de l’encaisse, et la différence entre le chiffre des billets en circulation et cette encaisse doit être représentée par un portefeuille et un actif bancable. En outre, si la circulation dépasse l’encaisse augmentée d’une somme déterminée, aujourd’hui fixée à 293 millions de marks, la Banque paie à l’État un impôt de 5 pour 100 sur l’excédent. Cette disposition est un frein constant à l’émission des billets, puisqu’une circulation soumise à une taxe aussi élevée ne peut donner de bénéfices à la Banque que si elle emploie ce capital additionnel à un taux supérieur à o pour 100, fort rare dans l’état actuel des marchés européens. La création de billets étant ainsi limitée en Allemagne, le pays vit sous un régime monétaire sévère, dont la correction est encore accentuée par l’absence de toute transaction financière entre le gouvernement et la Reichsbank. Le résultat en est le maintien d’un taux d’escompte en général supérieur au nôtre. Nous rappelons qu’en dehors de la Reichsbank, un certain nombre de compagnies particulières, dites Zettelbanken, ont le droit d’émettre des billets : mais leur importance, comme banques de circulation, va sans cesse en diminuant : leur émission totale de billets ne dépasse guère le dixième de celle de la Reichsbank.

Un point intéressant à mettre en lumière, c’est l’union étroite entre la banque et l’industrie, qui a contribué pour une bonne part aux résultats atteints par cette dernière en Allemagne. En France, il était de mode autrefois, chez une certaine école, de répéter : « Il n’y a pas de bonne industrie pour les banquiers », et de croire que ceux-ci devaient borner leur activité aux transactions en fonds d’États ou de villes, aux titres des sociétés financières. Les

  1. Voyez, dans la Revue du 1er avril 1890, notre article sur les Finances allemandes.